La Constitution donne-t-elle aux citoyens le droit “de résistance à l’oppression” ?
Auteur : Guillaume Baticle, doctorant en droit public à l’Université de Poitiers
Relecteur : Etienne Merle, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Clara Robert-Motta, journaliste
Source : Compte Facebook, le 26 août 2024
La résistance à l’oppression est bien reconnue dans notre droit, mais pas à l’article 35, comme l’affirment de nombreux internautes. Pour autant, son invocation semble difficile en l’absence de règles précisant les conditions de sa mise en œuvre.
Depuis l’annonce d’Emmanuel Macron de choisir de ne pas nommer de gouvernement issu du Nouveau Front Populaire, de nombreux internautes en appellent à “l’article 35 de la Déclaration des droits de l’homme” de 1793 qui instaurerait un droit de résistance à l’oppression. Cet article 35 avait été aussi largement partagée à la période des gilets jaunes en 2019 et réutilisé depuis.
Ainsi en 2023, un utilisateur de Facebook postait déjà une vidéo dans laquelle il appelait les citoyens à se “réveiller” face un qui serait gouvernement “despotique” en intimant aux spectateurs de lire l’article 35 de la Constitution. Sauf qu’il se trompe de texte, il ne s’agit pas de la Constitution de la Vᵉ République, mais de celle de 1793, qui n’a aucune valeur juridique.
Une Constitution jamais appliquée
Si le droit de résistance à l’oppression existe dans le droit français, sa mise en œuvre suscite de nombreuses interrogations. L’auteur de ce post invoque l’article 35 de la Constitution de 1793 qui prévoit que “quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs“.
Or cette Constitution, bien que promulguée, a été suspendue par le gouvernement révolutionnaire “jusqu’à la paix“. Le gouvernement tombant à la mort de Robespierre en juillet 1794, la Constitution est restée lettre morte et fut remplacée par un autre texte. Son article 35 est parti avec elle.
Un droit pourtant bien présent
Le droit de résistance à l’oppression est toutefois toujours présent dans notre droit puisqu’il est prévu par un autre texte à valeur constitutionnelle : la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen. Son article 2 énumère les droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Parmi eux, la résistance à l’oppression.
Reste que ce droit n’a reçu aucune traduction juridique concrète dans une loi qui fixerait les conditions de son exercice. En l’état actuel des circonstances, son invocation paraît donc difficile.
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