Robert Ménard : “Je redis à mes amis indépendantistes [catalans], car je leur ai déjà dit de venir vivre à Béziers en tant que réfugiés politiques”

Création : 6 novembre 2019
Dernière modification : 20 juin 2022

Autrice : Tania Racho, docteure en droit européen

Source : Robert Ménard, Equinox magazine, 28 octobre 2019

Un maire ne peut conférer de façon générale la qualité de réfugié politique à qui que ce soit, et encore moins à des citoyens de l’Union européenne qui font l’objet d’un mandat d’arrêt européen. Les « amis » en question pourront toujours venir à Béziers… où la justice les appréhendera pour les livrer à l’Espagne.

Le maire de Béziers propose l’asile dans sa ville aux indépendantistes catalans, seulement ce n’est pas lui qui décide de l’asile et il ne peut pas s’opposer à un mandat d’arrêt européen.

Tout d’abord, la protection d’une personne pour des motifs politiques (ou religieux ou en raison de l’appartenance à un groupe social) est décidée au niveau national par l’OFPRA, sur le fondement de la Convention de Genève de 1951. Un maire ne peut donc pas isolément décider d’octroyer l’asile à une personne.

De plus, les demandes d’asile d’un citoyen européen auprès d’un État membre de l’Union européenne sont rejetées par principe (même si ce n’est pas impossible selon le protocole n° 24 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne) car on préjuge de façon générale que ces États respectent les droits de l’homme.

Ensuite, certains des indépendantistes, tels que Carles Puigdemont, font l’objet d’un mandat d’arrêt européen. Il s’agit d’une demande émise par un juge pour poursuivre quelqu’un ou lui faire purger une peine prononcée. Un juge d’émission, ici le juge espagnol, a émis un mandat d’arrêt européen pour poursuivre Carles Puigdemont pour rébellion, sédition, détournement de fonds publics et désobéissance à l’autorité. Le juge exécutant le mandat n’a pas la possibilité de refuser de transférer Carles Puigdemont pour des raisons politiques (voir notre précédent surlignage sur le sujet). En effet, au contraire d’une demande d’extradition classique que la France peut refuser d’exécuter pour des motifs politiques, le mandat d’arrêt européen (donc entre États membres de l’Union européenne) s’applique obligatoirement. Aucun État de l’Union européenne ne peut refuser de s’y conformer pour des raisons politiques, comme voudrait le faire Robert Ménard. Il existe bien quelques motifs de refus, qui sont exhaustivement listés dans la décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen (par exemple quand l’intéressé est déjà poursuivi en France). Aucun de ces motifs ne vient conforter les propos de Robert Ménard.

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