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Jordan Bardella souhaite renvoyer de France tous les mineurs non accompagnés “sans distinction”

Création : 30 septembre 2020
Dernière modification : 20 juin 2022

Auteur : Corentin Pirat, étudiant Master 2 à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye, sous la direction de Jean-Paul Markus, professeur de droit public à l’Université Paris-Saclay

Source : BFM TV, BFM Politique, 3’

En l’état actuel du droit, expulser les mineurs non accompagnés contrevient à la fois au droit français et au droit international. À supposer qu’une majorité parlementaire RN modifie un jour ce droit national, il faudrait aussi modifier les conventions internationales ratifiées par la France, ou les dénoncer.

Le vice-président du Rassemblement national, Jordan Bardella, a déclaré vouloir reconduire à la frontière les mineurs non accompagnés, à la suite de l’attaque perpétrée près des anciens locaux de Charlie Hebdo le 25 septembre 2020 et de plusieurs faits de délinquance impliquant des mineurs sans adultes chargés de les représenter.

Or, les engagements internationaux de la France et le droit français interdisent l’éloignement des mineurs isolés et obligent à une protection de l’enfance. Il serait donc nécessaire de modifier la loi voire de modifier des conventions internationales pour mettre en œuvre une telle mesure.

Tout d’abord, le droit français interdit les expulsions de mineurs non accompagnés vers un État étranger (art. L. 521-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, “CESEDA”) ou leur reconduite à la frontière (art. L. 511-4 du même code).

D’autre part, plusieurs textes internationaux, ratifiés par la France, protègent les enfants migrants. Ainsi, la Convention internationale des droits de l’enfant (“CIDE”) précise dans son article 20 que « tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial (…) a droit à une protection et à une aide spéciale de l’État ».

C’est pourquoi le retour d’un enfant dans son pays d’origine ne peut être prononcé que par ordonnance du juge des enfants, ou dans le cadre d’un dispositif de réunification familiale dans le pays d’origine ou un autre pays d’accueil. Et ce retour ne peut être envisagé que s’il est conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant (article 3 de la CIDE). Cet intérêt supérieur de l’enfant a été récemment protégé par la Cour européenne des droits de l’homme dans un arrêt Moustahi contre France, qui condamne la France pour avoir expulsé de Mayotte des mineurs non accompagnés.

Ainsi, si Jordan Bardella souhaite mettre en œuvre l’éloignement systématique des mineurs non accompagnés, il devra modifier le droit français. Il devra aussi obtenir la modification de la Convention internationale des droits de l’enfant, ce qui nécessite l’accord des autres États. Ou alors, il faudra  dénoncer cette convention.

Contacté, Jordan Bardella n’a pas souhaité donner suite à nos sollicitations.

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