Emmanuel Macron, à propos des mères accompagnatrices des sorties scolaires : « Si elles sont en fonctionnaire ou quasi fonctionnaire ou collaborateur occasionnel du service public elles ne peuvent pas porter le foulard, c’est la laïcité qui l’impose »

Création : 18 avril 2018
Dernière modification : 15 juin 2022

Auteur : Raphaël Matta-Duvignau, maître de conférences en droit public à l’Université Paris-Saclay

Source : BFMTV, 15 avril 2018, 2h6m

L’état du droit ne permet pas actuellement d’interdire de manière inconditionnelle le port du voile pour les mères accompagnatrices de sorties scolaires. Si le Président de la République faisait-là référence à une loi en préparation, cela clarifierait enfin cette question.

Comme nous l’avions déjà écrit il y a quelques semaines, et contrairement à ce que prétend le Président de la République, la laïcité, aujourd’hui, ne permet pas l’interdiction générale et absolue du port du voile par les mères accompagnatrices de sorties scolaires.

Rappelons que seuls les agents du service public sont soumis au principe de neutralité et que la loi du 15 mars 2004 ne concerne que les élèves. Par ailleurs, les mères d’accompagnatrices ne peuvent, en tant qu’elles escortent les enfants lors de sorties, être considérées comme « fonctionnaires » ou « quasi fonctionnaires ». En effet, le Conseil d’État a précisé que les parents accompagnateurs de sorties scolaires ne sont ni des agents ni des collaborateurs du service public mais des usagers du service public (cette position est d’ailleurs source de débats nous en convenons aisément) qui ne doivent pas se soumettre au principe de neutralité religieuse. Par conséquent, les mères voilées ne sont pas soumises, en principe, à la neutralité religieuse.

Étrangement, en cas de dommages causés ou subis par les élèves de l’établissement qui leur sont confiés, la jurisprudence assimile – et uniquement dans cette hypothèse – les accompagnateurs bénévoles qui participent à l’encadrement des élèves à l’occasion d’une activité réalisée dans un but d’enseignement, aux membres de l’enseignement public. Ils bénéficient ainsi des dispositions protectrices prévues par l’article L. 911-4 du code de l’éducation : l’État devient responsable civilement des éventuels accidents lors de la sortie scolaire (même s’il peut ensuite se retourner contre l’accompagnateur s’il a commis une faute).

L’état du droit ne permet pas actuellement d’interdire de manière inconditionnelle le port du voile pour les mères accompagnatrices de sorties scolaires. Il appartient donc au législateur, le cas échéant, de préciser le statut des parents d’élèves accompagnateurs. Encore une fois, l’on gagnerait certainement en cohérence. Peut-être un texte est-il en préparation…

Par ailleurs, contrairement à ce que prétend Edwy Plenel (2h05) qui interviewait aussi le Président, les sorties scolaires se font certes hors de l’enceinte de l’établissement et donc sur l’ « espace public », mais elles sont organisées sur le temps scolaire : les élèves relèvent donc de l’autorité et de la responsabilité du chef d’établissement et des enseignants accompagnateurs et de telles sorties font partie des activités de service. Ce sont donc des activités pédagogiques relevant du projet d’établissement et ne peuvent en aucun cas être « externalisées » du temps scolaire. Pour faire simple, c’est « l’école hors les murs ».

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