Non, la morphopsychologie ne permet pas de voir sur un visage la dangerosité d’une personne
Autrice : Maylis Ygrand, étudiante à l’École publique de journalisme de Tours
Relecteurs : Etienne Merle, Clara Robert-Motta, journalistes
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Lili Pillot, journaliste
Source : Post Facebook, le 13 juillet 2024
Selon un post Facebook, publié le 13 juillet dernier, il serait possible de voir sur un visage la dangerosité d’une personne. Ces propos sont mensongers et peuvent conduire à de dangereuses dérives.
Au revoir Minority Report et sa précognition, bonjour la morphopsychologie. Selon un post publié sur Facebook, le 13 juillet dernier, cette discipline permettrait de repérer les individus dangereux, d’un simple regard sur leur visage.
Cette publication, digne d’un synopsis de science-fiction, a attiré l’attention des Surligneurs. Où se situe le vrai du faux ? Nous vous expliquons tout.
De quoi parle l’internaute ?
Le 13 juillet 2024, à 19 h 41, une internaute publie sur son compte Facebook un post en référence à l’enlèvement de la jeune Célya, retrouvée morte quelques heures après son enlèvement.
“Hier, quand j’ai vu passer cette alerte enlèvement concernant Célya à la TV, et que j’ai vu la photo du compagnon de sa mère, j’ai su instantanément que cette pauvre petite fille serait retrouvée morte”, assure la publication.
À l’en croire, cette prémonition n’aurait rien à voir avec le hasard : “La Morphopsychologie, que j’ai étudiée pendant deux ans, me permet de voir sur un visage la dangerosité d’une personne et lui, quand je l’ai vu, les mots exacts qui me sont venus à l’esprit ont été “la pauvre, elle n’a aucune chance“, précise l’internaute en référence à une photo du principal suspect, le beau-père de la jeune fille.
Mais quelle est donc cette discipline qui permettrait de catégoriser la dangerosité des personnes, simplement en regardant leur visage ?
Qu’est-ce que la morphopsychologie ?
“ La morphopsychologie, c’est l’étude de la corrélation entre la morphologie du visage et la personnalité de l’individu”, explique Frédéric Bergamelli, morphopsychologue à Voiron. Par exemple, le fait de “voir, grâce à la morphologie du visage, si dans la vie relationnelle affective, c’est quelqu’un qui va vers les autres ou qui va plutôt être un peu en retrait”, illustre Janine Marechalle, morphopsychologue et responsable pédagogique à la Société française de morphopsychologie.
“On émet des hypothèses pour aider les gens à se découvrir”, explique Carleen Binet, morphopsychologue à Saint-Sébastien-sur-Loire.
Une discipline qui ne permettrait pas de déceler la dangerosité
“Je suis étonnée de ce post”.“Je ne peux prédire la dangerosité d’une personne”. “C’est impossible”. Les trois morphopsychologues que les Surligneurs ont contacté sont unanimes. Cette discipline ne peut prédire un passage à l’acte. “Ce n’est pas une discipline pour voir la pathologie, la démence, la psychopathie des gens”, détaille Frédéric Bergamelli.
Même son de cloche du côté de David Vavassori, professeur en psychologie clinique et psychopathologie psychanalytique à l’université Toulouse 2 – Jean Jaurès : “Malheureusement, la dangerosité ne peut pas être étudiée ou “repérée” à partir d’un seul élément”.
Il appelle également à la prudence concernant la morphopsychologie qui, selon lui, “n’est pas une discipline psychologique ou criminologique et ne correspond à rien de scientifique”.
Souvent pointée du doigt, notamment pour une vision réductrice des paramètres qui entrent en jeu dans le développement de la personnalité, la morphopsychologie est défendue par ses praticiens comme étant une “science humaine”. Cependant, leur diplôme n’est pas reconnu en France.
Une chose est sûre : la morphopsychologie, science ou pas, ne permet pas de voir sur un visage la dangerosité d’une personne. Attention donc aux dérives qu’une telle publication pourrait générer. Le criminel né n’existe pas, laissons ce genre de fabulation à la science-fiction.
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