Yann Moix interprète mal la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État en affirmant « qu’à aucun moment elle n’interdit les crèches »
Dernière modification : 17 juin 2022
Auteur : Jean-Paul Markus
Source : On n’est pas couché, 6 janv. 2018, min. 38 à 41
M. Moix a tort d’affirmer que la loi de 1905 n’interdit pas les crèches dans les édifices publics, car c’est tout le contraire selon le juge : elles sont interdites par principe, sauf exception liée à la tradition ou la culture locales.
L’article 28 de loi de 1905 prévoit qu’il est interdit « d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit », à l’exception des édifices cultuels, cimetières, monuments funéraires, et musées ou expositions. Point de mention des crèches en effet, mais c’est oublier qu’une loi doit comporter des termes suffisamment généraux pour englober toutes les hypothèses envisagées par le législateur. Sinon, les lois devraient toutes s’enfler d’énumérations aussi longues qu’inefficaces car jamais exhaustives. Les crèches sont bien des emblèmes religieux au sens de la loi de 1905 selon le juge.
Toutefois, M. Moix est d’opinion que désormais les crèches de noël se sont « sécularisées » selon ses termes, et qu’elles seraient donc sorties du champ de la loi de 1905. Bien des personnes partagent cette vision, mais pas le Conseil d’État, qui est d’un avis plus nuancé : il a affirmé en 2016 et 2017 (à propos de la crèche de Béziers) qu’une crèche de Noël « est une représentation susceptible de revêtir une pluralité de significations », à savoir « une scène qui fait partie de l’iconographie chrétienne et qui présente un caractère religieux », mais aussi « un élément faisant partie des décorations et illustrations qui accompagnent traditionnellement, sans signification religieuse particulière, les fêtes de fin d’année ». À partir de ce constat, le juge reconnaît qu’une crèche dans une mairie peut s’inscrire dans une tradition locale sécularisée, festive et/ou culturelle. Mais c’est par exception d’une part, et ce n’était pas le cas à Béziers d’autre part.
Enfin, M. Moix affirme que le terme « laïcité » ne figure pas dans la loi de 1905, ce qui est vrai. Mais aux termes de l’article 1er de la Constitution, « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ».
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