Procès des attentats du 13-Novembre : comment sont sécurisés ces procès hors normes ?
Dernière modification : 24 juin 2022
Autrice : Camille Dubuffet, master de droit public, Université Lyon 3 Jean Moulin
Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit, Université Paris-Saclay
Le 13 novembre 2015, la ville de Paris était le théâtre d’attentats djihadistes faisant 129 morts et plus de 350 blessés. Près de 6 années après le drame, s’ouvre le procès “hors norme” d’un certain nombre de commanditaires, auteurs et complices de ces attaques. En conséquence, la Cour d’assises spéciale de Paris, juridiction accueillant l’événement, fait l’objet d’une sécurisation toute particulière et à la hauteur de la menace terroriste persistante. Si, pour les procès médiatisés comme celui-ci, se met en place un système de sécurité extraordinaire aux abords de la Cour d’assises spéciale, pour les autres procès, la vigilance reste également de mise. L’intérêt étant de rendre la justice dans les meilleures conditions possibles. La sécurité, assurée par différents intervenants, s’ancre à l’intérieur du bâtiment et s’étend à ses extérieurs.
la sûreté dans l’enceinte des tribunaux
À l’intérieur du bâtiment, les personnels en charge de la sécurité diffèrent suivant l’espace concerné. Les forces de l’ordre (policiers et gendarmes) gardent les salles d’attente de victimes, parcourent les couloirs, les lieux recevant du public et portent une attention toute particulière aux cellules contenant les accusés. De plus, le personnel des tribunaux est formé à réagir s’il advenait un quelconque incident.
Lors des audiences en revanche, c’est le président de la formation de jugement qui veille à l’ordre public (c’est la police des audiences). En effet, d’après le Code de procédure civile, “Tout ce qu’il ordonne pour assurer (l’ordre de l’audience) doit être immédiatement exécuté”. Il peut décider de faire intervenir les forces de l’ordre pour évacuer un individu perturbateur. Plus encore, s’il le juge pertinent, il peut s’interposer entre des avocats qui s’opposeraient trop violemment. Les débats doivent donc être “dignes”, selon les textes, ce qui exclut le désordre ou les échanges houleux.
À cela s’ajoute, et au regard de la difficulté pour le président de devoir gérer l’audience et la sécurité de celle-ci, la possibilité, depuis un protocole de 2011, de s’appuyer sur des réservistes de la police ou de la gendarmerie pour renforcer la sûreté. Des sociétés privées de sûreté sont pareillement autorisées à le faire.
la sécurité des accès aux tribunaux
Aux entrées et aux sorties des tribunaux se tiennent des forces de l’ordre prêtes à intervenir. Des contrôles spécifiques ont lieu, en plus d’un passage obligatoire par des portiques sécurisés, afin d’éviter qu’un objet porté par un accusé, spectateur ou témoin, ne puisse faire office d’arme. Les fouilles sont prévues par les règlements propres à chaque tribunal. Quant aux contrôles d’identité, ils sont effectués par des officiers ou des agents de police judiciaire en vertu du Code de procédure pénale. Le but est de prévenir un acte délictuel ou criminel dans l’enceinte du tribunal en éloignant un individu suspect, ou de faciliter son appréhension par les forces de l’ordre en vue d’une neutralisation future.
Dans le cas des personnes détenues menées à l’audience pour y être jugées, c’est l’administration pénitentiaire qui assure la protection des convois. Elle obéit à des règles strictes et est connue, depuis 2019, sous le nom de “Pôle de Rattachement des Extractions Judiciaires” (le PREJ). Cette branche de l’administration pénitentiaire est spécialisée dans les transports à risque.
la protection des abords des tribunaux lors de procès retentissants
Le cas très particulier du procès des attentats du 13 novembre 2015 permet d’évoquer les mesures de protection et de sécurité parfois exceptionnelles pouvant être mises en place. À l’extérieur du bâtiment, partout en France, c’est le maire de la ville (sous le contrôle du préfet) qui maintient la sûreté publique en exerçant sa compétence en matière de police administrative générale. À noter cependant qu’à Paris, d’après le Code général des collectivités territoriales et un vieil arrêté du 1er juillet 1800, sont établies des compétences partagées entre le maire de la ville et le préfet. Ainsi, c’est le préfet qui, dans une “situation de crise affectant une juridiction”, comme lors d’un procès hors normes, décide d’accroître la présence de forces armées, qu’il déploie et coordonne (lorsque plusieurs services de police interviennent) aux abords des tribunaux en application de “plans de protection externe” (PPE). Il peut, par arrêté, interdire certaines zones à la circulation en respectant un calendrier précis et clairement défini.
Enfin, d’après le Code de la sécurité intérieure, la vigilance pourra être renforcée par un processus de filtrage du public et la délivrance d’accréditations (notamment pour les journalistes).
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