Pour Cécile Duflot, les brevets sur les vaccins sont “un bien commun qui doit appartenir à l’ensemble de la planète”, ce qui exclut toute indemnisation des laboratoires
Dernière modification : 22 juin 2022
Auteurs : Karim Tadrist, responsable juridique, Gustave Roussy Transfert
Source : France Info, 6 mai 2021
Sauf si un accord international venait à permettre de “lever les brevets” sur les vaccins sans indemniser les laboratoires, la loi française oblige pour l’instant à les indemniser. Et il n’est même pas sûr que la levée de brevets sans indemnisation soit possible au regard de notre Constitution.
Cécile Duflot, présidente d’Oxfam France, qui réclame la “levée des brevets” sur les vaccins, commentait une interview de François Bayrou dans le 7/9 de France Inter : le président du MoDem estime qu’il “peut y avoir levée des brevets mais qu’il faudra indemniser les laboratoires”.
En droit français, l’indemnisation des laboratoires est obligatoire
En l’état du droit, c’est François Bayrou qui a raison. Le Code de la propriété intellectuelle prévoit une protection des inventions par les brevets. Sauf à modifier ces textes, il ne serait donc pas possible, pour le gouvernement français d’aller dans le sens de Cécile Duflot. Cependant, un mécanisme déjà existant permet, non pas de “lever les brevets”, mais d’accorder des “licences d’office”. Ces licences d’offices sont délicates à mettre en œuvre mais permettraient au gouvernement d’autoriser l’exploitation par des entreprises, de certaines inventions sans l’accord du titulaire du brevet, moyennant indemnisation de ce dernier. Il existe une procédure, qui nécessite un accord entre l’État et le titulaire du brevet, notamment sur le montant de l’indemnisation. À défaut, ce montant est fixé par le tribunal judiciaire.
Un accord international pourrait-il faire sauter le principe d’indemnisation ?
Reste que si les États se mettent d’accord sur le plan international, qui permettrait de modifier notre droit interne, la question de l’indemnisation peut revenir à la surface. Il existe actuellement une dynamique de soutien d’une demande de levée, portée par l’Inde et l’Afrique dont l’objectif est d’obtenir la suspension des sections 1, 4, 5 et 7 de la partie II des Accords sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (“Accords ADPIC”, conclus dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, OMC). Seule une suspension de ces Accords permettrait aux pays membres de l’OMC (dont la France) de s’affranchir des règles relatives au droit des brevets, dont celle de l’indemnisation.
Et encore… Il faudra que le Conseil constitutionnel ne s’y oppose pas en faisant prévaloir le principe constitutionnel du droit de propriété.
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