Non, un individu condamné pour vol de moto en Côte d’Ivoire ne peut pas échapper à une nouvelle condamnation en cas de récidive
Autrice : Clarisse Le Naour, double cursus L3 science politique et L3 droit public à l’université Lumière Lyon II
Relecteurs : Jean-Baptiste Thierry, professeur de droit pénal à l’université de Lorraine
Etienne Merle, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Etienne Merle, journaliste
Source : Compte Facebook, le 20 août 2025
En Côte d’Ivoire, la récidive — même pour un vol de moto — entraîne une condamnation, souvent plus lourde. Le principe de « nul ne peut être poursuivi ou puni deux fois pour les mêmes faits », ne s’applique qu’à un cas déjà jugé.
Condamné une fois, libre pour toujours ? C’est ce que laisse entendre une publication virale en Côte d’Ivoire : selon elle, un voleur de moto déjà condamné ne pourrait plus être jugé en cas de récidive, grâce au principe « nul ne peut être puni deux fois pour les mêmes faits ».
La publication largement relayée sur Facebook relate ainsi : « Droit pénal : Un individu vole une moto. Il est jugé et condamné à 5 ans de prison. À sa sortie, il commet à nouveau le même vol. On ne peut plus le condamner ».
Or, ce principe s’applique uniquement lorsqu’une personne a déjà été jugée pour une même infraction commise à une même date : la personne qui a été condamnée pour le vol d’une moto ne peut plus être ensuite condamnée pour le même vol de la même moto. En revanche, si elle récidive, elle peut évidemment être à nouveau poursuivie, avec des peines aggravées, selon le Code pénal ivoirien. Explications.
Un principe qui interdit la double sanction pour un même fait
Le droit ivoirien, comme le droit français, reconnaît le principe non bis in idem : nul ne peut être poursuivi ou puni deux fois pour les mêmes faits.
Ce principe est également prévu dans des traités internationaux ratifiés par la Côte d’Ivoire en 1992, comme le Pacte international relatif aux droits civils et politiques à l’article 14.
Concrètement, cela signifie que si une personne a déjà été condamnée à une certaine date pour un vol, elle ne peut pas être rejugée une seconde fois pour ce même vol.
Pour reprendre l’exemple diffusé sur les réseaux sociaux : si une personne a déjà été condamnée pour le vol d’une moto en 2020, il ne peut pas être rejugé en 2023 pour ce vol de 2020.
Un même acte ne peut pas donner lieu à plusieurs condamnations. Mais il ne s’applique qu’à des faits strictement identiques.
La récidive, une nouvelle infraction
L’affirmation partagée sur les réseaux sociaux repose sur une confusion entre un fait unique, protégé par le principe de non bis in idem et des faits distincts qui, eux, ouvrent droit à de nouvelles poursuites. En réalité, une personne peut être condamnée autant de fois qu’elle commet de nouveaux vols. Mieux — ou pire, c’est selon — il y a de grandes chances qu’elle soit considérée comme récidiviste.
L’article 123 du code pénal ivoirien prévoit d’ailleurs que la récidive est une circonstance aggravante. En l’espèce, lorsque la personne commet à nouveau le même délit dans un délai de cinq ans après une première condamnation — ce qui est le cas dans l’exemple cité dans l’affirmation erronée — elle s’expose à une peine pouvant aller jusqu’au double de la peine initialement encourue.