« Même sans consommer, vous paierez plus cher » : pourquoi cette affirmation sur la hausse du coût de l’énergie est hâtive
Auteur : Nicolas Turcev, journaliste
Relectrice : Clara Robert-Motta, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Clara Robert-Motta, journaliste
Source : RMC, le 29 juillet 2025
À partir du 1er août, la part fixe des abonnements au gaz et à l’électricité augmente. Mais cette hausse, en partie contenue par des réductions de taxes, peut être rattrapée par une diminution de la consommation.
Les auditeurs de RMC se sont réveillés avec de bien mauvaises nouvelles, le 29 juillet. À partir du 1er août, « vous aurez beau réduire votre consommation [d’énergie], […] couper tout chez vous, vous paierez plus », annonce le chroniqueur conso de la matinale. « Il y a de quoi s’énerver », tempête l’intervenant.
Au diapason, plusieurs internautes scandalisés ont partagé la séquence sur leurs comptes. « On prend vraiment les Français pour des cons : payer plus sans consommer, c’est du vol organisé sous couvert de transition énergétique », s’indigne un utilisateur de Facebook, dont la publication a été partagée près de 2 000 fois.
Sauf que l’affirmation du chroniqueur de RMC est largement exagérée. Si une hausse du coût de l’énergie entre effectivement en vigueur au 1er août, celle-ci peut être compensée par une réduction de la consommation, surtout si elle est réduite à zéro.
À consommation constante, la facture augmente
L’intervenant l’explique pourtant clairement : au 1er août, la TVA augmente de 5,5 % à 20 % sur la part fixe du coût de l’énergie. Cette portion de la facture de gaz et d’électricité correspond au prix de l’abonnement à l’offre du fournisseur d’énergie. Elle est complétée par une part variable, qui dépend de la consommation énergétique du ménage. La TVA sur cette part, fixée à 20 %, ne changera pas au 1er août.
L’augmentation des prélèvements, décidée dans le projet de loi de finances 2025, est en partie compensée par la réduction d’une taxe sur la part variable : l’accise. Pour l’électricité, cette taxe passe, au 1er août, de 33,70 euros/MWh à 29,98 euros/MWh, soit une réduction de 11 %. La diminution de l’accise sur le gaz est du même ordre : de 17,16 euros/MWh, elle passe à 15,43 euros/MWh.
La facture d’électricité sera en plus réduite par une baisse de 2,5 % de la TURPE, un tarif payé pour le raccord au réseau de distribution, compris dans la part fixe.
Résultat : à consommation constante, les ménages qui consomment le plus d’électricité verront leur facture diminuer, selon la plateforme de comparaison d’offres d’énergie Hello Watt. La hausse de la TVA sur la part fixe sera en effet compensée par la réduction de l’accise et de la TURPE.
Inversement, les petits consommateurs d’électricité ne bénéficieront pas assez de ces gains. Dans leur cas, le coût de l’abonnement pèse plus sur la facture que la part variable, alignée sur la consommation. La hausse de la TVA ne sera donc pas totalement compensée par la réduction de l’accise et entraînera une hausse de la facture.
Ainsi, selon les calculs d’Hello Watt, un foyer consommant 500 kWh verra sa facture annuelle d’électricité augmenter d’environ 12 euros par an, soit 5,6 %. Un ménage avec une dépense énergétique de 2 000 kWh paiera chaque année environ 3 euros de plus, soit une hausse de 0,6 %.
La facture des ménages au gaz, à consommation constante, devrait, elle, augmenter. Et ce, peu importe le volume d’énergie consommé. Là aussi, les petits consommateurs seront les plus pénalisés, selon Hello Watt.
Les foyers avec une consommation annuelle de 500 kWh devraient voir leur facture de gaz augmenter de 8,5 %, soit environ 16 euros par an. Cette hausse ne sera que de 2,1 % pour les ménages qui utilisent 4 000 kWh, soit environ 14 euros par an.
La baisse de la consommation réduit bien la facture
Ces scénarios se basent toutefois sur le postulat que les ménages conservent le même niveau de consommation, et donc la même part variable. Or, comme le rappelle Hello Watt, il est possible de réduire cette part pour limiter, voire annuler l’impact de la hausse de l’abonnement. Par exemple : en réduisant sa consommation.
En France, le tarif de l’électricité proposé par EDF est réglementé. Il est donc possible de calculer quelles économies d’énergie devrait réaliser un ménage abonné à ce fournisseur pour compenser l’augmentation de la TVA sur l’abonnement.
En reprenant les estimations d’Hello Watt, la hausse pour un foyer consommant annuellement 2 000 kWh – environ la consommation d’une personne par an, selon l’ORE et l’Insee – serait annulée par une réduction de la consommation de 15 kWh. Cela correspond à la consommation d’énergie d’une machine à café utilisée chaque jour pendant deux minutes et demie, selon une estimation du distributeur d’énergie belge Sibelga.
Il est donc faux d’affirmer, comme l’a fait RMC, que la facture d’électricité des Français augmentera même s’ils « coupe[nt] tout » chez eux. La réduction de la consommation permet, bien évidemment, de réduire la facture d’énergie.