Martine Vassal, candidate LR à Marseille veut voir les auteurs de dégradations publiques condamnés à des travaux d’intérêt général
Dernière modification : 20 juin 2022
Auteur : Emmanuel Daoud, avocat à la Cour
Source : Programme « Martine Vassal Marseille », p. 31
Un maire ne peut pas infliger une peine de travaux d’intérêt général, car c’est précisément une peine, qui ne peut être infligée que par un juge. De plus, le juge doit garder la possibilité de personnaliser la peine, qui ne peut donc être automatique.
Si elle est élue, Martine Vassal promet : « nous sanctionnerons les actes de dégradation et solliciterons la mise en œuvre de travaux d’intérêt général pour que les tagueurs, encadrés par des tuteurs spécifiquement formés et des réservistes, nettoient les tags qui défigurent les monuments, les portes, les façades, et les devantures commerciales ».
Martine Vassal, candidate LR à la mairie de Marseille, indique ainsi sa volonté de « lutter contre les dégradations publiques, avec un objectif « zéro tag » dans des périmètres ciblés du centre-ville et des noyaux villageois », et de « lutter sans relâche contre ces actes de vandalisme » par une série de mesures.
Mais d’abord, les travaux d’intérêt général prononcés à l’encontre d’auteurs de dégradations sont des sanctions qui ne peuvent être prononcées que par un juge. Le principe de séparation des pouvoirs interdit à un maire ou même à un agent de police municipale de sanctionner, de prononcer des peines à l’encontre d’auteurs d’infractions, y compris les peines dites « alternatives à l’emprisonnement », comme le sursis assorti de travaux d’intérêt général.
Ensuite, la peine dite de « sursis assorti de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général » (ou « TIG ») consiste à prononcer un sursis à l’exécution d’une peine d’emprisonnement sous réserve que la personne condamnée accepte d’accomplir, durant un certain temps, un travail d’intérêt général non rémunéré (article 132-54 du code pénal). C’est une substitution aux peines relatives aux crimes et délits (excluant les contraventions), soumise au consentement de la personne concernée, qui doit l’indiquer à l’audience ou par écrit. Cette alternative à l’emprisonnement est soumise au contrôle du juge d’application des peines qui détermine l’organisme compétent (organisme public ou association habilitée) et le type exact des travaux à effectuer (jardinage, restauration du patrimoine, actes de solidarité, etc.). Il serait donc impossible pour un maire de sanctionner directement les auteurs de dégradations par des TIG, ou même de « solliciter la mise en œuvre de travaux d’intérêt général » auprès du juge.
Enfin, il semble que Martine Vassal s’inspire de l’article 322-1 du code pénal : « Le fait de tracer des inscriptions, des signes ou des dessins, sans autorisation préalable, sur les façades, les véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain est puni de 3 750 euros d’amende et d’une peine de travail d’intérêt général lorsqu’il n’en est résulté qu’un dommage léger ».
Il n’en résulte pas pour autant une peine systématique voire automatique. Ce serait contraire à l’exigence constitutionnelle d’individualisation des peines. On retrouve ce principe à l’article 132-1 du code de procédure pénale qui abolit les peines dites « planchers » depuis 2014 : « Toute peine prononcée par la juridiction doit être individualisée ». La même loi ajoute que seule la juridiction « détermine la nature, le quantum et le régime des peines prononcées en fonction des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale ». Cela équivaut à des peines automatiques inconstitutionnelles (décision du Conseil constitutionnel du 11 juin 2010). En effet, le juge doit toujours garder son pouvoir de modulation des peines (décision du Conseil constitutionnel du 29 septembre 2010).
Contactée, Martine Vassal explique aux Surligneurs qu’elle « solliciterai[t] auprès du service pénitentiaire d’insertion et de probation (ou du tribunal pour enfant pour les mineurs), l’habilitation de la Ville de Marseille à accueillir les personnes condamnées à des TIG ». Ce qui est effectivement possible, mais ce n’est pas la promesse qu’elle affiche.
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