Marlène Schiappa : “Quand un étranger commet des violences sexistes et sexuelles, il doit cesser d’être accueilli en France”

Création : 6 août 2020
Dernière modification : 20 juin 2022

Auteur : Bryan Guedmi, étudiant en études européennes à Sorbonne Nouvelle, sous la direction de Tania Racho, docteure en droit public à l’Université Paris 2 Panthéon-Assas

Source : Les Grandes Gueules, RMC, 23 juillet 2020

Les violences sexistes et sexuelles sont heureusement condamnées par la loi en France mais seul le viol ou des infractions répétées de la part d’un étranger pourrait engendrer son expulsion, sauf si son pays d’origine ne présente un danger pour sa vie.

Lors de son passage dans l’émission Les Grandes Gueules diffusée sur RMC Story, Marlène Schiappa, aujourd’hui ministre déléguée à la citoyenneté, a déclaré vouloir expulser les étrangers coupables de violences sexistes et sexuelles : injures non publiques, captation ou diffusion d’images ou de messages à caractère sexiste ou sexuelle, exhibition, harcèlement et viol. Une volonté en continuité avec le combat féministe qu’elle mène mais qui nécessite quelques précisions.

Il faut commencer par rappeler à Marlène Schiappa que tous les étrangers ne peuvent pas être mis dans la même catégorie juridique et que par conséquent, des normes nationales et internationales, assorties de conditions précises existent déjà et régissent de manière différente l’accueil et l’expulsion des étrangers. Trois cas sont à distinguer.

Si l’étranger est ressortissant d’un État membre de l’Union européenne, il est possible pour l’État de l’expulser, mais seulement s’il représente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour l’ordre public et la sécurité publique. Ce cas de figure s’est déjà produit dans une décision de la CJUE rendue en 2012 pour un ressortissant italien, vivant en Allemagne et ayant commis des violences sexuelles répétées sur mineure. On est donc loin de la seule agression sexuelle.

En ce qui concerne le cas des immigrés non Européens, la situation n’est encore une fois pas aussi simple que le laisse entendre Marlène Schiappa. L’immigré doit là aussi avoir commis un viol ou bien des agressions sexuelles répétées. ll n’est pas nécessaire qu’il ait été définitivement condamné pour un crime ou un délit, la dangerosité de son comportement peut suffire. Mais avant de décider d’un retrait de son droit de séjour, il faut prendre en compte les liens privés et familiaux qu’il entretient, la durée de sa présence sur le territoire français ainsi que son état de santé. Ces éléments le protègent dans de nombreuses situations, mais sans pour autant lui garantir une immunité complète.

Enfin, les réfugiés, eux, peuvent se voir retirer le bénéfice de l’asile dans certaines situations précises, dont une qui avait été envisagée lors des violences à Dijon. C’est lorsque le réfugié fait l’objet d’une condamnation pénale définitive pour un crime ou un délit puni de 10 ans d’emprisonnement au moins, ce qui est le cas pour les viols, et si la présence de l’étranger sur le territoire français constitue une menace grave pour la France qu’il pourrait se voir retirer son statut.

Mais attention, il faut noter que le retrait du statut de réfugié à un étranger n’est pas synonyme d’expulsion, notamment lorsque l’étranger encourt des risques dans son pays d’origine comme ce fut le cas pour Piotr Pavlenski. De même, un mineur ne peut faire l’objet d’une expulsion. 

Si la mesure d’expulsion est prise, elle peut alors être immédiate ou différée mais n’est pas définitive et l’étranger dispose bien entendu de recours pour la contester.

On voit donc qu’on est loin de pouvoir expulser tout étranger qui commet des violences sexistes et sexuelles. Une agression sexuelle par exemple ne suffit pas.

Une erreur dans ce contenu ? Vous souhaitez soumettre une information à vérifier ? Faites-le nous savoir en utilisant notre formulaire en ligne. Retrouvez notre politique de correction et de soumission d'informations sur la page Notre méthode.

Faites un don défiscalisé, Soutenez les surligneurs Aidez-nous à lutter contre la désinformation juridique.