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#LegalCheck. Programme PCF aux élections européennes : “Nous proposons que l’on puisse déroger aux règles (…) européennes qui vont à l’encontre des intérêts démocratiques, sociaux et économiques du peuple de France et du monde du travail”

Création : 29 mai 2024

Autrice : Émilie Delcher, maître de conférences en droit européen à l’Université de Nantes

Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public à l’Université Paris-Saclay

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétariat de rédaction : Guillaume Baticle

Source : Programme du Parti Communiste

Il y a deux façons de déroger. En négociant avec les partenaires européens une modification des traités. Ce sera long… voire improbable. Ou alors désobéir. Et ce sera l’amende.

Le programme du Parti Communiste Français ne précise pas par quels moyens il entend « déroger » au droit de l’Union. Mais le PCF entend faire voter des lois françaises créant des exceptions aux règles européennes, les traités ne prévoient pas une telle possibilité : elle remettrait en cause l’application uniforme du droit de l’Union européenne. Si le PCF entend obtenir des dérogations par le droit de l’Union même, la France ne se mettrait pas en infraction, mais encore faudra-t-il faire admettre ces dérogations aux autres États membres.

Comment obtenir des dérogations au droit européen ?

Pour qu’une dérogation soit introduite dans le droit de l’UE, les États devraient alors procéder à une révision des traités. Si cela n’est pas impossible, cela reste une procédure aussi longue qu’improbable : il faudrait notamment que les 27 États membres de l’Union s’accordent sur cette possibilité et sur ses modalités. Et chacun en profiterait pour négocier ses propres dérogations.

À défaut, “désobéir” au droit de l’UE ?

Le PCF envisage peut-être que la France puisse décider unilatéralement de ne plus respecter ses obligations qui découlent du droit de l’Union européenne. Il s’agirait, pour la France, de ne plus respecter ses engagements pris en signant et ratifiant les traités européens, qui prévoient, notamment, la possibilité pour les institutions de l’Union d’adopter des directives dans le champ des compétences, c’est-à-dire dans les domaines, dans lesquels les États ont permis à l’Union européenne d’intervenir.

Les directives sont généralement adoptées par le Conseil de l’UE, qui représente les Ministres des États membres, et par le Parlement européen, dont les membres sont élus par les citoyens de l’Union européenne. Le Conseil des Ministres se prononce en règle générale à la majorité qualifiée – qui, pour être atteinte, doit réunir au moins 55 % des États membres représentant au moins 65 % de la population totale de l’Union. Le Parlement quant à lui se prononce à la majorité des suffrages exprimés.

Ainsi, par exemple, le Parlement français pourrait décider de ne pas transposer une directive adoptée par les institutions de l’Union, ou d’adopter une loi qui modifierait une loi antérieure ayant procédé à la transposition d’une directive. Il s’agirait là d’une violation du droit de l’Union – de l’obligation de transposer les directives – qui ne serait pas sans conséquence pour la France. Elle s’exposerait en effet à un constat de « manquement » par la Cour de Justice, qui pourrait conduire à une sanction financière pour non-transposition d’une directive. En 2008, la France a ainsi été condamnée à verser la somme de 10 millions d’euros pour transposition tardive d’une directive sur les OGM.

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