Le sponsor de l’équipe cycliste Arkéa-Samsic y va franchement face aux soupçons de dopage : “Pour moi, s’il y a mise en examen, c’est que vous avez fait une connerie”
Dernière modification : 20 juin 2022
Auteur : Pierre Fleury-Le Gros, maître de conférences en droit privé à la Faculté des affaires internationales du Havre
Source : Eurosport, 9 octobre 2020
La présomption d’innocence bénéficie à toute personne mise en examen. Elle interdit à quiconque d’agir comme si cette personne était coupable.
Vendredi 8 octobre, Christian Roulleau, fondateur de la société Samsic et co-sponsor principal de l’équipe cycliste Bretonne Arkea-Samsic s’est exprimé à la suite de l’ouverture d’une enquête préliminaire pour soupçon de dopage à l’encontre des membres de son équipe lors du tour de France. Il a déclaré aux journalistes de Ouest France qu’en cas de mise en examen de l’un de ses membres, il mettrait un terme à son implication à titre de sponsor dans la compétition. Pour expliquer sa position, il a déclaré « Pour moi, s’il y a mise en examen, c’est que vous avez fait une connerie, que vous avez quand même fauté (…) Il n’y a pas d’équivoque. Si c’est « On a fauté », moi je me retire ».
Les conséquences tirées de cette mise en examen potentielle sont juridiquement inexactes, et contraires au principe de la présomption d’innocence.
Le droit français (article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789) et le droit international (article 11.1 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 notamment) imposent le respect du principe de la présomption d’innocence.
En application de ce principe, une personne est présumée innocente tant qu’un juge ne l’a pas reconnue coupable de la commission d’une faute pénale. Par conséquent, même une éventuelle mise en examen n’autorise pas à affirmer qu’une faute pénale a été commise.
Dans le cas des membres de l’équipe Arkéa-Samsic, la mise en examen redoutée signifierait seulement qu’il existe à leur encontre des indices graves ou concordants permettant de les soupçonner d’avoir commis une infraction (article 80-1 du code de procédure pénale). Mais contrairement à ce qu’affirme leur sponsor, ce contexte ne signifie pas qu’une faute pénale a été commise. Deux étapes seront nécessaires avant d’être autorisé à l’affirmer :
- d’une part, la procédure d’instruction devra déjà déterminer s’il existe ou non des charges suffisantes qui justifient le renvoi des intéressés devant un juge (article 179 alinéa 1 du code de procédure pénale)
- d’autre part, il appartiendra alors seulement à celui-ci d’apprécier ces charges et de rendre, le cas échéant, une décision de condamnation constatant l’existence d’une faute.
Ainsi, tant qu’un juge n’aura pas condamné les membres de l’équipe Arkéa-Samsic, Christian Roulleau ne pourra pas affirmer qu’ils ont commis une faute.
La remise en cause de son engagement en tant que sponsor relève, en revanche, d’une toute autre question : il est libre d’investir son argent comme il l’entend.
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