#LegalCheck. Florian Philippot : « L’UE vient d’imposer à la France de ne plus du tout contrôler sa frontière avec l’Italie et de ne plus renvoyer un seul migrant ! »
Autrice : Capucine Lemaire, master droit de l’Union européenne à l’Université de Lille
Relecteur : Christian Osorio Bernal, juriste et enseignant en droit des affaires européennes et internationales à l’Université de Lille
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Guillaume Baticle
Source : Compte Facebook de Florian Philippot, 23 mai 2024
L’Union européenne n’interdit pas à la France de contrôler sa frontière avec l’Italie ou de renvoyer des migrants, mais exige que ces actions respectent la libre circulation des personnes et les droits individuels.
En février 2024, une décision du Conseil d’État avait suscité des réactions, notamment de Florian Philippot, président du mouvement Les Patriotes. Il avance que l’Union européenne impose « à la France de ne plus du tout contrôler sa frontière avec l’Italie et de ne plus renvoyer un seul migrant« . Cette décision fait suite à une décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 21 décembre 2023. Elle ordonne à la France de cesser les contrôles systématiques et les renvois immédiats de migrants à sa frontière avec l’Italie, pour se conformer aux exigences juridiques européennes en matière de libre circulation des personnes.
Les implications pour la France
En effet, même si le Conseil d’État a confirmé que les renvois immédiats de migrants sans examen individuel sont interdits, cela ne signifie pas que la France doit accepter tous les migrants sans condition. En effet, deux cas permettent des renvois.
Premièrement, les États membres peuvent renvoyer des migrants en situation irrégulière après un examen complet de leur situation, conformément à l’article 6, paragraphe 3, du code frontières Schengen. Par exemple, l’accord bilatéral entre la France et l’Italie permet de renvoyer ces migrants après une évaluation individuelle.
Deuxièmement, l’article 25 du code frontières Schengen permet des : « contrôles temporaires en cas de menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure« . Selon les articles 26 et 27 du même code, un État membre peut : « réintroduire temporairement des contrôles renouvelables si nécessaire, après consultation avec les autres États membres et notification à la Commission européenne ». Ces mesures assurent un équilibre entre la sécurité et le respect des droits individuels dans la gestion des flux migratoires.
Distinction des situations et contextes de renvoi
La gestion des migrations dans l’Union fait une distinction entre les migrants irréguliers selon qu’ils se trouvent dans un État membre ou doivent être renvoyés vers un pays tiers. Au sein de l’Union européenne, les États membres comme la France peuvent renvoyer les migrants vers l’État par lequel ils sont entrés, conformément à des règles telles que celles établies par l’article 8 du code frontières Schengen, et le règlement Dublin III à l’article 26 ou suivant des accords bilatéraux spécifiques, tels que celui entre la France et l’Italie. Ces renvois exigent une évaluation de chaque cas pour assurer le respect des droits individuels.
Concernant les États tiers, selon l’article 33 du code frontière Schengen les renvois doivent respecter les accords de réadmission établis entre l’Union européenne ou ses États membres et ces pays. Ces accords, signés avec des pays comme la Turquie en 2013, définissent les modalités de retour tout en veillant au : « respect des droits humains et en prévoyant des mesures pour la réintégration des migrants« . Ils visent à réguler les flux migratoires de manière ordonnée et à renforcer la coopération sécuritaire, illustrant ainsi une approche qui conjugue gestion des migrations et respect des obligations internationales en matière de droits de l’Homme.
Ainsi, l’Union n’interdit pas à la France de contrôler sa frontière avec l’Italie ou de renvoyer des migrants, mais exige que ces actions respectent la libre circulation des personnes et les droits individuels. La France doit adapter ses pratiques pour se conformer à ces exigences, tout en utilisant les outils juridiques disponibles pour gérer les flux migratoires de manière efficace et humaine.
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