Fabien Roussel propose de “re-nationaliser EDF” afin d’obtenir une “baisse de 50% des factures d’énergie”

Création : 6 janvier 2022
Dernière modification : 27 juin 2022

Auteur : Miriana Exposito, master droit de l’Union européenne, Université de Lille

Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit, Université Paris-Saclay

Source : Simulateur de calcul de facture d’électricité, Fabien Roussel 2022

EDF est déjà une entreprise nationale. De plus, il n’est pas possible de revenir au monopole du siècle dernier selon le droit européen. EDF est soumise au droit de la concurrence, ce qui lui interdit aussi les prix trop bas, destinés à tuer les concurrents.

Dans son programme électoral, Fabien Roussel promet de baisser les factures d’électricité des français de 50%. Pour cela, le candidat à la présidentielle de 2022 propose de re-nationaliser EDF. Bien qu’alléchante, cette proposition pose problème.

En proposant de re-nationaliser EDF, le candidat à la présidentielle semble avoir oublié que l’entreprise appartient déjà à l’État français. Cette confusion est probablement due au statut d’EDF, qui est devenu une société anonyme de droit privé depuis 2004, alors qu’elle était auparavant un établissement public. Mais ce statut de société n’a absolument aucun impact sur le régime de propriété. L’État possède plus de 83 % du capital d’EDF, ce qui en fait une entreprise publique, qu’on ne peut donc pas re-nationaliser. Sur ce point, la proposition de Fabien Roussel est inutile.

Même publique, EDF ne pourrait retrouver son monopole ou écraser la concurrence par les prix

Le but de cette re-nationalisation serait entre autres de baisser la facture d’électricité des Français de 50%. Mais il semble difficile de baisser les prix de l’électricité à ce point sans violer les règles de concurrence, en particulier dans un contexte de cherté de l’énergie. Une telle baisse reviendrait à mettre en place des “prix prédateurs”, qui sont des prix si bas qu’ils auraient pour effet de forcer les concurrents à suivre, et comme ces derniers sont plus fragiles, ils feraient vite faillite. Or, le Code de commerce prohibe ce genre de pratiques.

Ce que semble souhaiter en réalité Fabien Roussel, c’est de soustraire EDF aux règles de concurrence et de revenir au monopole de l’État sur la production et la distribution d’électricité comme il existait au siècle dernier. Or, l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité a été décidée par l’Union européenne, dans le but de construire un marché intérieur de l’énergie. La soumission d’EDF à la concurrence a donc été mise en place en application de directives européennes, et celles-ci priment sur le droit national. Si le candidat souhaite le retour du monopole d’EDF, cela ne pourrait se faire sans violer le droit de l’Union européenne et risquer une condamnation de la France par la Cour de justice de l’Union.

Un autre détail interroge : comment Fabien Roussel calcule-t-il la réduction de 50% envisagée ? Une facture d’électricité est composée du prix de la fourniture d’énergie, mais aussi d’un abonnement forfaitaire  et de taxes et contributions diverses. Seul le prix de la fourniture d’énergie peut varier, en fonction du fournisseur… mais pour bien des foyers près de la moitié de la facture électrique est composée de l’abonnement et des taxes, dont la TVA. En d’autres termes, baisser de 50 % le seul prix du kilowattheure ne ferait pas baisser la facture totale d’autant.

Sollicité par nos soins, Fabien Roussel nous fait répondre : en devant une société anonyme, EDF “dépend des logiques marchandes”. Face à ce modèle il s’agit de “refaire d’EDF un établissement public industriel et commercial (…) au service son peuple, et non d’une poignée d’actionnaires”.

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