Emmanuel Macron sur l’obligation d’un repos journalier de 11h, souhaite que « aussi bien la Gendarmerie que le ministère des Armées ne soient pas concernés par la directive »

Création : 1 novembre 2017
Dernière modification : 17 juin 2022

Auteur : Jean-Paul Markus

Source : Discours devant les forces de sécurité intérieure, 18 octobre 2017

La position du Président Macron sur la non-application des onze heures de repos journalier est conforme au droit européen, au vu des circonstances exceptionnelles que nous vivons. Mais pour combien de temps ?

Le Président Macron entend sortir les forces armées du champ d’application de la directive fixant le temps de repos journalier à 11 heures. Pas si évident.

Le droit au repos journalier de onze heures est imposé par une directive européenne de 2003 (article 3) : « les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie, au cours de chaque période de vingt-quatre heures, d’une période minimale de repos de onze heures consécutives ». Mais cette directive a un champ d’application limité par une autre directive de 1989 (article 2) : « la présente directive n’est pas applicable lorsque des particularités inhérentes à certaines activités spécifiques dans la fonction publique, par exemple dans les forces armées ou la police, ou à certaines activités spécifiques dans les services de protection civile s’y opposent de manière contraignante ».

Cette exclusion des forces armées n’est toutefois pas si radicale que le Président pourrait le croire. Par un arrêt de 2005, la Cour de justice de l’Union européenne a en effet jugé que la directive de 1989 devait s’interpréter de façon restrictive, au sens où seules « certaines activités spécifiques » sont visées, et non des professions ou des secteurs entiers. Cela suppose déjà un premier tri, parmi les forces armées, entre les agents participant à ces activités spécifiques, et les autres. Surtout, la Cour ajoute, y compris s’agissant de la Guardia Civil espagnole en 2006, que seuls des « événements exceptionnels », créant des « situations de risque collectif grave », justifient que ces personnels accordent une priorité absolue à leur objectif (au détriment du repos). Tel serait le cas, selon la Cour, de « catastrophes naturelles ou technologiques, d’attentats, d’accidents majeurs ou d’autres événements de même nature ». Malheureusement, nous y sommes.

Reste que cette position du Président n’est pas indéfiniment tenable. Il faudra bien plancher sur « l’après », c’est-à-dire un risque maîtrisé ou atténué d’attentats. Et à supposer même que ce risque reste constant, on ne serait plus dans une situation exceptionnelle au sens où l’entend la Cour, et il faudrait alors imaginer d’autres solutions. Car les directives de 1989 et 2003 ont pour objectif la sécurité des travailleurs en leur assurant le repos. Des forces de l’ordre sans repos peuvent-elles encore assurer la sécurité ?

 

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