Emmanuel Grégoire (1er adjoint à Paris) et les banderoles pro-grèves sur l’hôtel de ville de Paris : “l’hôtel de ville n’est pas une mairie au sens juridique du mot”
Dernière modification : 11 février 2023
Auteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay
Secrétariat de rédaction : Loïc Héreng et Emma Cacciamani
Source : BFMTV, 1er février 2023
C’est vrai, l’hôtel de ville n’est qu’un bâtiment, non assimilable à la mairie. Il n’en fait pas moins partie des moyens du service public, et ne peut faire l’objet d’utilisations à des fins politiques.
Emmanuel Grégoire, premier adjoint à la mairie de Paris, peine à défendre devant une presse tatillonne, la légalité de la décision d’apposer d’immenses banderoles soutenant la grève et les manifestations contre la réforme des retraites, sur la façade de l’hôtel de ville de la capitale, aux frais du contribuable parisien. L’argumentaire d’Emmanuel Grégoire est fondé sur une distinction entre l’hôtel de ville, qui ne serait qu’un “bâtiment central”, “qui n’est pas une mairie au sens juridique du mot puisque ce sont les mairies d’arrondissements”. C’est vrai, mais peu importe sur le fond : la décision de faire poser des banderoles partisanes sur la façade de l’hôtel de ville reste illégale.
“Hôtel de ville” ou “mairie”, peu importe au regard du principe de neutralité
D’abord une précision syntaxique : le dictionnaire ORTOLANG désigne sous le mot “mairie” “l’administration municipale”, ainsi que “l’édifice où se trouvent le bureau du maire et les services de l’administration municipale et où siège habituellement le conseil municipal”. La neuvième édition du dictionnaire de l’académie définit la mairie comme le “bâtiment, ensemble de bâtiments où se tient l’administration municipale”. Les dictionnaires juridiques vont dans le même sens. Quant à l’expression “hôtel de ville”, elle désigne en effet le bâtiment qui héberge, dans les grandes villes, les services centraux de la mairie, dont le conseil municipal.
Si l’hôtel de ville n’est donc qu’un bâtiment au contraire de la mairie, il n’en fait pas moins partie des moyens du service public, et ne peut à ce titre faire l’objet d’utilisations à des fins politiques. Ce bâtiment est d’ailleurs “affecté au service public” comme on dit en droit, et il est donc soumis, lors de son utilisation, au principe de neutralité.
Emmanuel Grégoire vient de donner raison à Robert Ménard !
S’il fallait distinguer entre le bâtiment et le service public qu’il héberge, on pourrait installer des banderoles à caractère politique sur le “Palais de l’Élysée”, qui n’est jamais qu’un bâtiment, et sur l’ ”Hôtel Matignon”. Surtout, l’argument du premier adjoint à la mairie de Paris est non seulement faux en droit, mais il donne raison à Robert Ménard, maire de Béziers, et aux autres maires qui installent des crèches de Noël à caractère religieux dans leur “hôtel de ville” au mépris des principes de neutralité et de laïcité des services publics. Ne lui dites pas merci.
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