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Crédit : Florent Peylet - CC BY-SA 4.0

Donald Trump a-t-il accepté de rendre à la France la statue de la Liberté en échange de territoires ?

Création : 21 mars 2025

Auteur : Nicolas Turcev, journaliste

Relectrice : Clara Robert-Motta, journaliste

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétariat de rédaction : Clara Robert-Motta, journaliste

Source : Publication Facebook, le 20 mars 2025

Alors que l’eurodéputé français Raphaël Glucksmann avait demandé aux États-Unis de restituer la statue de la Liberté, des internautes affirment que Donald Trump aurait suggéré de rendre le monument contre des territoires. Si la Maison-Blanche a réagi à ces propos, les propos attribués au président sont faux et tirés d’un site parodique.

La statue de Liberté contre un morceau de la France. C’est l’accord fou qu’aurait proposé Donald Trump à son allié, selon plusieurs internautes. Citation à l’appui.

« Trump accepte de restituer la Statue de la Liberté en échange de toutes les terres de France libérées pendant la Seconde Guerre mondiale ! », affirme un utilisateur de Facebook, qui prétend citer le magnat de l’immobilier.

« Vous pouvez récupérer votre petite statue, et nous reprendrons les territoires français que nous avons dû préserver pour vous. La France peut garder chaque centimètre carré de territoire que vous, les Français, n’avez pas cédé aux nazis. C’est très généreux, un accord vraiment formidable », aurait déclaré Donald Trump selon des internautes.

Seul problème : tout est faux. La citation est issue d’un article parodique qui s’amuse d’une récente passe d’armes diplomatique entre Raphaël Glucksmann et la Maison-Blanche.

« Politicien français de rang inférieur »

Le 16 mars 2025, l’eurodéputé français a émis l’idée de demander aux États-Unis de restituer le monument. « Nous allons dire aux Américains qui ont choisi de basculer du côté des tyrans, aux Américains qui virent les chercheurs pour avoir fait preuve de liberté scientifique, ‘rendez-nous la statue de la Liberté. On vous en a fait cadeau, mais apparemment vous la méprisez. Alors elle sera très bien ici chez nous’ », s’est exclamé le dirigeant du microparti Place publique.

« Absolument pas », lui a répondu cash la Maison-Blanche, le 18 mars, par la voix de sa porte-parole, Karoline Leavitt. « Mon conseil à ce politicien français anonyme de bas étage serait de se rappeler que c’est uniquement grâce aux États-Unis que les Français ne parlent pas en allemand à l’heure actuelle. Ils devraient être reconnaissants envers notre grand pays », a taclé la communicante.

Mais Donald Trump ne s’est pas lui-même exprimé sur cette affaire ni n’a proposé de s’approprier les terres françaises libérées par les États-Uniens lors de la Seconde Guerre mondiale. Les citations qui sont prêtées au chef de l’exécutif états-unien par les internautes proviennent en réalité d’un article parodique, paru le 19 mars sur le site The Babylon Bee.

Son auteur imagine également la réponse qu’aurait pu formuler Emmanuel Macron, le président français, à une telle proposition : « Ce n’est pas juste. On a vraiment essayé de ne pas avoir besoin du sauvetage des Américains [pendant la Seconde Guerre mondiale]. On s’est battu, genre, pendant quelques semaines avant de se rendre totalement ».

The Babylon Bee se décrit comme « le meilleur site de satire au monde, absolument infaillible dans tout ce qu’il affirme […], créé ex nihilo au huitième jour de la création, il y a exactement 6 000 ans ». Le slogan de sa lettre d’information promet « des fausses nouvelles auxquelles vous pouvez vous fier ». Autrement dit, la statue de la Liberté n’est pas prête de quitter la baie de Manhattan, et la France ne risque pas de devenir une colonie états-unienne.

La réponse à la réponse

Raphaël Glucksmann a, lui, légèrement recalibré sa position à la suite de l’intervention de Karoline Leavitt. « La statue [de la Liberté] est la vôtre », a affirmé, le 17 mars, l’eurodéputé dans une série de publications sur X adressées aux États-Uniens.

L’élu salue le « sacrifice » des « centaines de milliers de jeunes Américains » qui ont débarqué en Normandie. « Mais l’Amérique de ces héros se battait contre les tyrans, elle ne les flattait pas », nuance-t-il, reprochant à l’administration Trump d’être « l’amie de Poutine », le président russe, et de « virer des chercheurs qui ont utilisé des mots bannis ».

La proposition de récupérer la statue de la Liberté visait à « réveiller » les consciences, assure le parlementaire. « Et si le monde libre n’intéresse plus votre gouvernement, nous reprendrons le flambeau », conclut-il.