David Le Bars veut soigner de force les toxicomanes de La Villette
Dernière modification : 24 juin 2022
Autrice : Camille Dubuffet, master droit public, Université Jean Moulin Lyon 3
Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay
Source : Europe 1, Punchline, 27 septembre 2021, 2’27
Rachida Dati avait fait la même proposition. Or il est impossible, en France, d’obliger un individu à se soigner ou à accepter l’hospitalisation, s’il ne présente aucun risque pour lui-même ou autrui.
Le secrétaire général du syndicat des commissaires de la police nationale française, David Le Bars, au micro de Laurence Ferrari, s’est dit favorable à ce que les toxicomanes des quartiers nords de Paris soient “séparés [des riverains] dans des structures hospitalières”. Il indique vouloir “les enfermer, les contraindre” à suivre un traitement médical. D’après le droit français, cela est impossible.
Le Code de la santé publique prévoit que le consentement d’une personne à se faire soigner doit toujours être recherché avant des soins, sauf urgence. Donc on ne peut pas hospitaliser de force une personne pour la mettre sous soins, ce qui vaut aussi pour les toxicomanes.
Les conditions pour obliger une personne à se soigner
Si un individu souffre d’une maladie mentale mettant sa propre vie en péril ou bien celle d’autrui (comme par exemple les riverains, cités par David Le Bars), l’autorité ou une tierce personne peuvent, sur avis médical, demander l’hospitalisation psychiatrique. Mais cette possibilité ne peut concerner des groupes de personnes : Les maladies mentales sont à appréhender individuellement et aucune généralité ne peut être faite. Soigner de force TOUS les toxicomanes s’avère totalement illégal.
Autre possibilité, les injonctions thérapeutiques, également citées par le secrétaire général du syndicat des commissaires de la police nationale. Il s’agit d’obligations de soin prononcées par le juge, lorsqu’un individu toxicomane est condamné pénalement. Ces injonctions peuvent aller jusqu’à l’hospitalisation. Mais on n’est pas non plus dans ce cas.
Seule l’incitation aux soins est possible
L’intervention de David Le Bars s’inscrit dans l’actuelle polémique relative à l’implantation de plusieurs salles de shoot dans la capitale.
Ces structures ont été souhaitées comme des encadrement spécifiques permettant la consommation de produits stupéfiants ailleurs que sur la voie publique. Elles sont ouvertes à différents profils de toxicomanes comme les consommateurs de crack de La Villette. Les professionnels de santé ont la possibilité d’orienter les individus vers la désintoxication mais ne peuvent les y contraindre. C’est toujours le principe du consentement aux soins qui prime.
David Le Bars admet d’ailleurs lui-même qu’une telle mesure nécessitera un “éclaircissement législatif”. Or, enfermer de force des groupes de toxicomanes pourrait bien être carrément contraire à la Constitution.
Contacté, le syndicat des commissaires de la police nationale n’a pas répondu à nos sollicitations.
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