D’après Didier Raoult “Le président du Conseil de l’Ordre ne détient pas la vérité scientifique. Il détient un pouvoir de décision et éventuellement un pouvoir de nuisance”.
Dernière modification : 21 juin 2022
Auteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public à l’Université Paris Saclay
Source : BFMTV, le 18 novembre 2020
L’Ordre n’est pas censé défendre une vérité scientifique mais un consensus médical, autrement dit une doctrine majoritaire dans le monde médical, qu’il ne fait que constater. Un médecin qui défend une doctrine minoritaire argumentée et qui l’applique à ses patients dans le respect des règles de déontologie n’a rien à craindre. Et s’il dénonce un manque d’impartialité de l’Ordre, il ajoute qu’il aurait pu en profiter…
Le professeur Raoult est depuis peu poursuivi devant la juridiction de l’Ordre des médecins. À en croire la presse, il devra répondre du reproche de charlatanisme, une pratique interdite par le code de déontologie médicale (art. 39), et qui peut entraîner une interdiction temporaire de plusieurs années voire la radiation définitive de l’Ordre. En défense, il réplique que le président de l’Ordre ne détient pas la vérité scientifique, ce qui est vrai. Or non seulement ce n’est pas le président de l’Ordre qui juge, mais ce n’est pas sur ce seul critère que Didier Raoult sera jugé.
Le code de déontologie médicale interdit aussi aux médecins de “divulguer dans les milieux médicaux un procédé (…) insuffisamment éprouvé sans accompagner leur communication des réserves qui s’imposent” (article 14), de “faire courir un risque injustifié” au patient (article 40), ou de “délivrer des médicaments non autorisés” (article 21). Ils doivent aussi “apporter leur concours à l’action entreprise par les autorités compétentes en vue de la protection de la santé” (article 12).
En somme l’Ordre n’est pas censé sanctionner une divergence de point de vue entre médecins, au nom d’une vérité médicale qui serait inscrite dans la loi. Mais si au nom d’une divergence de point de vue un médecin met en danger ses patients (ex. préconiser les plantes contre un cancer), ou compromet l’efficacité des politiques de santé (ex. dissuader de vacciner les enfants), il sera sanctionné. En somme, comme dans tous les domaines, il y a en médecine une doctrine dominante (le “consensus médical”), et des doctrines minoritaires qui pourraient un jour devenir majoritaires si elles sont solidement argumentées et appliquées aux patients en tenant compte des contraintes légales (les essais thérapeutiques). Reste à savoir où l’Ordre mettra le curseur dans l’affaire Raoult.
Enfin, le professeur Raoult pointe ce qu’il appelle le “pouvoir de nuisance” de l’Ordre des médecins. Il dénonce ainsi le manque d’impartialité de l’Ordre, qui serait en substance soumis au gouvernement et au lobby du vaccin. Il est vrai que les tribunaux lui donnent parfois raison, en sanctionnant l’Ordre lorsqu’il utilise ses pouvoirs légaux à des fins partiales. Mais Didier Raoult ajoute : “l’ancien président du Conseil de l’Ordre à Marseille était un ami, cette histoire aurait été classée sans suite”. L’Ordre peut effectivement être partial, CQFD.
Une erreur dans ce contenu ? Vous souhaitez soumettre une information à vérifier ? Faites-le nous savoir en utilisant notre formulaire en ligne. Retrouvez notre politique de correction et de soumission d'informations sur la page Notre méthode.