Crédits photo : Lionel Barbe, CC 4.0

Aurore Bergé, député LREM : “la seule loi qui s’applique en France est la loi de la République. Aucune autre ne lui est supérieure. Ni la ‘coutume’, ni la ‘tradition’, ni le Coran, ni la Charia”

Création : 15 octobre 2020
Dernière modification : 20 juin 2022

Autrice : Tania Racho, docteure en droit public de l’Université Paris II Panthéon-Assas

Source : Compte twitter d'Aurore Bergé, le 6 octobre 2020

La député Aurore Bergé a probablement été maladroite dans son tweet : au vu du contexte, son objectif était certainement de souligner la supériorité de la loi sur les traditions religieuses en France. Cependant, il existe de nombreuses normes au-dessus de la loi, comme le droit européen ou bien la coutume internationale.

Les propos de la député sur Twitter interviennent en réaction d’un autre tweet qui évoquait la polygamie. Le journaliste Idriss Sihamedi disait en effet que la polygamie en Islam est le fait d’avoir plusieurs femmes qui ont le même statut, en comparant leurs situations à celle de femmes qui seraient avec un même homme politique et qui ne bénéficieraient donc pas d’un statut marital. 

Même si on comprend sur le fond ce qu’a voulu dire Aurore Bergé en opposant la loi de la République aux préceptes de l’Islam, elle a tort dans sa formulation car au-dessus de la loi, il y a de nombreuses autres normes et c’est le concept de hiérarchie des normes qui est ainsi malmené. 

Au-dessus de la loi, il y a notamment le droit européen et le droit international, au sein duquel on retrouve notamment des coutumes.

Tout d’abord le droit européen est pleinement et entièrement supérieur à la loi. Il est composé de différentes normes : des conventions du Conseil de l’Europe ainsi que des traités, règlements, directives et décisions de l’Union européenne. Cela veut dire concrètement que le législateur français ne peut pas adopter des lois qui sont contraires au droit européen, et que si un juge se retrouve confronté à une loi française qui n’est pas conforme au droit de l’Union il est tenu de l’écarter, au profit donc de la norme européenne. Cette supériorité, appelée principe de primauté, a été reconnue par les États membres de l’Union européenne dans une déclaration spécifique, rattachée au traité de Lisbonne. 

Le droit international est lui aussi composé de plusieurs types de normes, dont des conventions internationales et la coutume internationale. Certes, ce n’est probablement pas la même coutume que la député Aurore Bergé avait en tête (on pense aux coutumes religieuses), mais le mot est le même et cela peut semer le doute. Les coutumes internationales (voir l’article 38 du Statut de la Cour internationale de justice) portent sur des sujets assez variés, que ce soit pour régir la conclusion de traités, avec par exemple l’adage pacta sunt servanda, qui signifie que les accords doivent être respectés, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ou encore certaines règles du droit de la mer.

Aurore Bergé avait certainement conscience de limiter ses propos à l’opposition entre la loi et les traditions qu’elle assimile à des coutumes mais son tweet porte à confusion car il existe bien des normes supérieures à la loi, y compris la coutume internationale.

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