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Agnès Pannier-Runacher : « La Charte de l’environnement a un rôle, mais dans la limite de la loi »

Création : 17 mai 2024

Auteur : Guillaume Baticle, doctorant en droit public

Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public à l’Université Paris-Saclay

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Source : Public Sénat, 15 mai 2024

La Charte de l’environnement a une valeur constitutionnelle, elle est donc supérieure à la loi, et non l’inverse.

S’exprimant au sujet du Projet de loi d’orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture, Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, a expliqué que les enjeux environnementaux ne doivent pas empêcher l’agriculture de se développer. La journaliste qui lui faisait face lui a opposé la Charte de l’environnement de 2004. Ce à quoi la ministre a répondu que la Charte devait s’appliquer dans la limite de la loi, ce qui en droit est faux : dans la mesure où la Charte a une valeur constitutionnelle, c’est méconnaître la hiérarchie des normes.

La Charte de l’environnement a valeur constitutionnelle…

La Charte de l’environnement est un texte qui comprend des droits relatifs à un environnement sain et équilibré et des devoirs comme la préservation de la biodiversité et la réparation des dommages causés à l’environnement. Elle a été ajoutée à la Constitution de 1958 depuis la révision constitutionnelle de 2005. Depuis cette même révision, le préambule de la Constitution de 1958 énonce :  « Le Peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l’Homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu’ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu’aux droits et devoirs définis dans la Charte de l’environnement de 2004« . Pour cette raison, le Conseil constitutionnel considère la Charte comme un texte à valeur constitutionnelle (décisions du 19 juin 2008 et du 7 mai 2014).

… elle est donc supérieure à la loi

L’État de droit repose, dans notre système, sur une hiérarchie entre les normes : les actes règlementaires (décrets, arrêtés municipaux) ont une valeur inférieure à la loi et doivent donc la respecter. La loi a elle-même une valeur inférieure à la Constitution qu’elle doit respecter. Or, en droit français, la Constitution s’entend de ce qu’on appelle le « bloc de constitutionnalité », qui regroupe la Constitution de 1958 (son préambule et ses articles 1er à 89) et, le préambule de la Constitution de 1946, la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, et enfin la Charte de l’environnement de 2004.

Par conséquent, la Charte ne s’applique pas « dans la limite de la loi » comme le déclare la ministre, mais c’est la loi qui s’applique dans la limite de ce que la Charte permet.

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