Valérie Pécresse propose de « réactiver l’article du code pénal qui permet de traduire devant un juge les individus fichés S pour intelligence avec l’ennemi avant qu’ils ne commettent un attentat »
Dernière modification : 15 juin 2022
Auteurs : Emmanuel Daoud et Juliette Vigny
Source : Compte Twitter V. Pécresse, 14 mai 2018, s’exprimant sur LCI
Les articles du code pénal condamnant les intelligences avec une puissance étrangère ne permettent pas de traduire en justice les fichés « S » avant qu’ils ne commettent des attentats.
Valérie Pécresse, Présidente de la Région Île-de-France, se justifie en ajoutant dans un autre tweet : « Nous sommes en guerre contre le terrorisme et l’Etat Islamique est bien l’ennemi ! »
Précisons d’abord que l’infraction d’«intelligence avec l’ennemi » n’est plus incriminée en tant que telle. En effet, l’article 411-4 du code pénal incrimine au titre de la « trahison » ou de « l’espionnage » le fait d’entretenir des intelligences avec une puissance étrangère, une entreprise ou une organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou avec leurs agents, en vue de susciter des hostilités ou des actes d’agression contre la France, ou encore le fait de leur fournir les moyens d’entreprendre des hostilités ou d’accomplir des actes d’agression contre la France. En outre, l’article 411-5 du code pénal incrimine les intelligences avec l’étranger lorsque celles-ci portent atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation. Ces infractions sont dites formelles, c’est-à-dire qu’elles sont constituées – et donc punissables – même en l’absence de toute action concrète ayant abouti (qu’on désigne en droit par l’expression « résultat positif »). Cependant, ces intelligences doivent avoir donné lieu à des faits matérialisés.
S’agissant des notions de « puissance étrangère », « entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger », une réponse ministérielle du 5 janvier 2016 rappelle que si une organisation terroriste (comme l’État Islamique) pourrait être considérée comme une organisation étrangère, les infractions des articles 411-4 et 411-5 avaient essentiellement pour vocation de réprimer des intelligences avec une organisation étrangère réellement qualifiable d’État. Enfin, selon le rapport d’activité 2016 de la délégation parlementaire au renseignement (DPR), les personnes fichées « S » ne le sont pas nécessairement pour des problématiques terroristes (contre-espionnage notamment). D’autant que si la « fiche S » concerne les individus qui peuvent porter atteinte à la sûreté de l’État et à la sécurité publique, les personnes qui entretiennent des relations directes avec ces derniers peuvent également être fichées S.
En somme, aucun des textes sur l’intelligence avec l’ennemi n’est applicable à la situation, non seulement parce que l’État Islamique n’est pas une puissance étrangère qualifiable d’État, mais aussi parce que tous les fichés « S » n’ont pas commis les actes concrets d’intelligence avec l’ennemi.
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