Les Surligneurs est un média indépendant qui lutte contre la désinformation juridique.

rubriques
Aigle royal dans les hauteurs du Majinghorn, Suisse. Crédits : Giles Laurent. CC BY-SA 4.0. Image d'illustration jaunie.

Les animaux sauvages ne tombent-ils « jamais malades », comme l’affirment certains internautes ?

Création : 14 août 2025

Auteur : Nicolas Kirilowits, journaliste

Relecteur : Etienne Merle, journaliste

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétariat de rédaction : Clarisse Le Naour, double cursus L3 science politique et L3 droit public à l’université Lumière Lyon II

Source : Compte Facebook, le 9 août 2025

L’idée selon laquelle les animaux sauvages ne seraient jamais malades relève d’une mythification de la nature et non de faits scientifiques.

Les animaux sauvages, vivants dans une nature « non-polluée », sont-ils dotés d’une santé de fer au point de ne jamais être malades ? C’est en tout cas ce que pense savoir un internaute dans un message publié sur Facebook et partagé  des centaines de fois.

La question paraît simple, mais la réponse ne l’est pas, notamment à cause du flou autour des termes employés. L’auteur de cette affirmation, Jean-Jacques Crèvecœur — un internaute régulièrement épinglé pour publier de la désinformation — précise dans la vidéo accompagnant son post que les animaux sauvages ne sont jamais malades « lorsqu’ils sont dans la nature non polluée ». Mais que désigne-t-il par « nature non polluée » ? Mystère. Contacté, il n’a pas répondu à nos demandes.

Partons donc de ce que tout le monde peut comprendre : les animaux sauvages ne tomberaient jamais malades. Vrai ou faux ? Faux, répondent les informations recueillies par Les Surligneurs. « Les animaux sauvages tombent bien évidemment malades », assure la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO). 

« Les maladies sont des phénomènes naturels causés par des bactéries, des virus et autres parasites lorsque le système immunitaire des animaux n’est pas en mesure de réagir de manière appropriée », explique Sylvain Larrat, vétérinaire spécialiste de la faune sauvage et aquatique. Et « ces maladies affectent les animaux sauvages également », ajoute-t-il.

Même constat à l’ASPAS (Association pour la protection des animaux sauvages) : « Les bactéries et les virus font aussi partie du grand cycle du vivant. Tout organisme vivant, domestique ou sauvage, est susceptible de ‘tomber malade’, de contracter telle ou telle maladie et de la transmettre à d’autres ».

Dans son dernier rapport sur « la situation mondiale de la santé animale », l’Organisation mondiale de la Santé animale, rappelle que « les maladies animales ne connaissent pas de frontières. Qu’elles affectent le bétail, la faune sauvage ou les espèces aquatiques, leur impact peut être dévastateur ».

Maladies partout, parfaite santé nulle part

Pour Sylvain Larrat, cette vision erronée de la vie sauvage repose notamment sur un défaut d’observation : « Si un animal éternue dans la nature, personne ne le verra ni ne l’entendra. Il n’ira pas, s’il a un problème, chez le vétérinaire comme éventuellement un animal domestique. Et quand on observe des animaux sauvages en forêt par exemple, on ne peut pas deviner instantanément leur état de santé. Il faut passer beaucoup de temps en extérieur pour découvrir des animaux malades ou morts du fait d’une maladie. » Difficile dès lors d’avoir des données précises comme pour les animaux domestiques.

Autre preuve que leur santé n’est pas immuable : certains animaux savent se soigner eux-mêmes, rappelle la journaliste Yolaine de La Bigne dans Les secrets de l’animal médecin. « En général, les animaux ont beaucoup de problèmes intestinaux. Ils ont aussi beaucoup de problèmes de peau », explique-t-elle dans une interview pour Réel média.

Et cela ne date pas d’hier : même les dinosaures avaient leurs maux. En 2022, une étude américaine relayée par la presse (ici ou ici) observait chez eux des problèmes respiratoires. Or, ces reptiles vivaient bien avant toute pollution humaine — un contexte bien éloigné des propos de Jean-Jacques Crèvecœur, dont l’expertise en faune sauvage semble, elle, inexistante.

En effet, son CV LinkedIn indique une formation en sciences physiques et en philosophie des sciences. Il est également auteur de nombreux ouvrages sur « la croissance individuelle ». Rien en revanche d’une quelconque spécialité ou formation sérieuse concernant la faune sauvage.