Nouvelle-Calédonie : Marion Maréchal appelle à l’activation de l’état de siège pour ramener l’ordre
Auteur : Guillaume Baticle, doctorant en droit public
Relecteur : Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public à l’Université de Poitiers
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Aya Serragui
Source : LCI, La Grande Confrontation, 21 mai 2024, 1h11
Il est toujours possible pour le gouvernement de décréter l’état de siège, mais en cas de saisine, le juge appréciera la proportionnalité de cette mesure au regard des circonstances.
Lors du dernier débat pour les élections européennes qui a réuni les têtes de liste, Marion Maréchal, qui conduit la liste Reconquête, s’est exprimée sur la situation très tendue en Nouvelle-Calédonie. Afin de désamorcer la situation, elle a proposé de décréter l’état de siège, confiant de ce fait les prérogatives administratives aux militaires. Pas sûr que le juge valide cette décision.
Deux situations de mise en œuvre de l’état de siège…
L’état de siège, bien que présent depuis 1958 à l’article 36 de la Constitution, n’a jamais été décrété sous la Vᵉ République. Pas même lors de la guerre d’Algérie. Il ne peut être mis en œuvre que dans deux situations prévues à l’article L2121-1 du code de la défense : “en cas de péril imminent résultant d’une guerre étrangère ou d’une insurrection armée“. L’état de siège est décidé par un décret pris en Conseil des ministres. Au bout de douze jours, sa prorogation doit être autorisée par le Parlement.
…contrôlées par le juge
Décréter l’état de siège est lourd de conséquences. Les pouvoirs civils et administratifs sont confiés aux militaires qui peuvent mettre en place des couvre-feux, décider des perquisitions administratives (sans qu’il n’y ait besoin du mandat d’un procureur) et interdire des réunions publiques ou l’accès à certaines parties du territoire. Face à une telle mesure d’exception, une association de défense des libertés pourrait porter un recours contre le décret qui applique l’état de siège, en saisissant le Conseil d’État par la voie du référé. Le juge administratif examinerait alors si cet état de siège répond à une guerre étrangère ou à une insurrection armée et si cette mesure est proportionnelle, compte tenu des atteintes portées aux droits et libertés des personnes. Dans la négative, le juge pourrait alors suspendre le décret. Pour reprendre l’expression du juriste allemand Fleiner qui illustre le principe de proportionnalité, il ne faut pas tirer sur les moineaux à coups de canon.
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