La “Première dame” en France : un statut juridique inversement proportionnel à sa place dans la vie publique

Eric Pouhier (CC 2.5)
Création : 26 janvier 2023
Dernière modification : 27 janvier 2023

Auteur : Guillaume Baticle, master de droit public, Université de Picardie Jules Verne

Relecteurs : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay

Vincent Couronne, docteur en droit européen, chercheur associé au centre de recherches VIP, Université Paris-Saclay

Secrétariat de rédaction : Emma Cacciamani, Yeni Daimallah et Loïc Héreng



Même si le conjoint du président de la République à un rôle de plus en plus important, le droit ne prévoit rien le concernant, ne lui offrant aucun statut juridique, à part une charte de 2017 non contraignante.

D’Adolphe Thiers à Emmanuel Macron, les présidents de la République française ont toujours (ou presque) été accompagnés de leur épouse (ou compagne) sur le perron du Palais de l’Élysée. Bien qu’elles n’aient qu’une place symbolique dans l’imaginaire français, les « premières dames » occupent pourtant de plus en plus l’espace médiatique, voire politique. Pour autant, quel est le cadre juridique qui leur est réservé ?

Un cadre juridique quasi-inexistant

Pour l’instant exclusivement féminin, le conjoint du président n’a pas de rôle légalement établi. Depuis le début de la IIIème République en 1875, le droit n’a jamais mentionné le conjoint du président. Il existe cependant un usage voulant que le conjoint du chef de l’État bénéficie d’une place dans l’ordre protocolaire et soit présent lors des réceptions officielles et des voyages diplomatiques. Mais le décret qui fixe l’ordre protocolaire de préséance ne mentionne pas le conjoint. Entre 1997 et 2011, le Code de procédure pénale assimilait toutefois l’épouse du président à une autorité administrative, avant que ce texte soit abrogé.

Mais un rôle grandissant

Reste que la Première dame a un rôle toujours plus actif sous la Vème République. D’abord une sorte de symbole qui accompagne le chef d’État à l’instar d’Yvonne de Gaulle et d’Anne-Aymone Giscard d’Estaing, la Première dame a ensuite pris part à des actions culturelles et caritatives, avec Danielle Mitterrand et Bernadette Chirac. 

Elle n’hésite pas non plus à soutenir les choix de son époux et s’exprimer sur les politiques publiques. Sa légitimité est souvent discutée à cet égard, la Première dame n’étant ni élue, ni nommée, ne disposant en somme d’aucun titre juridique.

Le conjoint.e du président dispose également de moyens. Il possède un bureau au sein de l’Élysée et un cabinet de conseillers l’entoure. Ces moyens proviennent toutefois du budget attaché à la fonction du président de la République, pas à une fonction quelconque qu’occuperait la Première dame.

La charte de 2017

En 2017, avec l’élection à la magistrature suprême d’Emmanuel Macron est créée la Charte de transparence relative au statut du conjoint du chef de l’État. Cette charte ne crée pas de cadre juridique, mais énumère des fonctions qui étaient en réalité déjà exercées par les premières dames depuis Danielle Mitterrand. 

Ainsi, elle « assure la représentation de la France, aux côtés du Président de la République, lors des sommets et réunions internationales », et « peut également prendre part à des actions nationales et internationales, mises en place avec d’autres conjoints de Chefs d’État, notamment pour lutter contre le changement climatique ou encore les violences faites aux femmes et aux enfants« , « soutient, par son parrainage ou sa présence, des manifestations à caractère caritatif, culturel ou social ou qui participent au rayonnement international de la France ».

De même, elle apparaît comme une sorte d’intendante de la maison élyséenne : elle « répond aux sollicitations des Français et des personnalités françaises et étrangères qui souhaitent la rencontrer », « supervise la tenue des manifestations et réceptions officielles au sein du Palais de l’Élysée ».

Enfin, elle apparaît comme une force d’impulsion, soutenant « les initiatives publiques ou privées qui permettent à la société française d’être plus inclusive face aux différences », chargée de« missions particulières de réflexion et de propositions ».

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