Le Conseil de l’Europe veut interdire de dire à ses enfants de filer dans leur chambre

Création : 17 octobre 2022
Dernière modification : 5 juin 2023

Autrice : Tania Racho, docteure en droit européen, chercheuse associée à l’IEDP, Université Paris-Saclay

Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay

Secrétariat de rédaction : Emma Cacciamani et Yeni Daimallah

Source : Tweet d’Annika Bruna, députée RN au Parlement européen, 10 octobre 2022

C’est sur la base d’un simple dépliant du Conseil de l’Europe, qu’une députée européenne (donc de l’Union européenne qui n’a rien à voir), tweete une contre-vérité juridique. Le Conseil de l’Europe n’a aucun pouvoir contraignant en matière familiale…

Le 10 octobre 2022, Annika Bruna, députée européenne (RN) déclare que “Le Conseil de l’Europe s’apprête à interdire aux parents de dire à leurs enfants “file dans ta chambre” ou “au coin”. Cette intrusion constante dans l’éducation des enfants dénie tout rôle pédagogique aux parents”.

Une vague de protestation a envahi les médias et les politiques à l’égard du Conseil de l’Europe, probablement confondu une fois de plus avec l’Union européenne. Cette organisation européenne ne peut rien interdire : elle ne produit pas de normes contraignantes. Il y a parfois des recommandations de son Comité des ministres ou des résolutions de l’Assemblée parlementaire mais jamais de contrainte. 

Un simple dépliant ne fait pas loi !

Reste à savoir pourquoi cette crainte a été partagée de nombreuses fois alors qu’elle est fausse. En réalité, il existe une brochure du Conseil de l’Europe sur le concept d’éducation positive, datant de 2008. Des associations qui souhaitent que le Conseil de l’Europe revoit sa position sur le “time out”, qui consiste à punir les enfants en les envoyant dans leur chambre, ont écrit à ce sujet au service des droits des enfants du Conseil de l’Europe. Ces derniers confirment simplement qu’ils souhaitent mettre à jour la brochure sans apporter davantage d’indications de positionnement sur cette position, comme le souligne un article du média Le Bien Public

Les erreurs d’interprétation des positions du Conseil de l’Europe sont récurrentes, surtout lorsqu’elles concernent les enfants. En 2015, le Comité européen des droits sociaux du Conseil de l’Europe avait estimé que la France ne respectait pas ses engagements liés à la Charte sociale européenne, en n’interdisant pas la fessée. Une fois encore, la rumeur avait circulé, attribuant cette interdiction à l’Union européenne. 

Contactée, Annika Bruna n’a pas répondu à nos sollicitations.


Cet article a été rédigé dans le cadre d’un événement organisé le jeudi 13 octobre, avec le soutien de l’OTAN, pour former les lecteurs des Surligneurs à la lutte contre la désinformation dans le domaine du droit. 

L’activité proposée était un événement en ligne d’une journée sous la forme d’un « legalthon » consacré à l’État de droit. RESILEX visait à rassembler des chercheurs en droit, des étudiants, des personnes d’influence, des journalistes et le grand public afin d’améliorer la résilience de la société dans le domaine de l’État de droit et de la démocratie. Les participants ont surveillé l’actualité et ont repéré les informations erronées ou les approximations juridiques présentes dans les propos des personnalités publiques. 

Les articles ont été rédigés et publiés en toute indépendance par les Surligneurs, selon la méthode utilisée pour tous les articles de legal-checking publiés sur le site. 

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Le 5 juin 2023, l’’explication de cet évènement a été modifiée dans le cadre de la mise en conformité des Surligneurs avec l’article 3.1.C du Code européen de fact-checking.

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