Xavier Bertrand, président (LR) de la région Hauts-de-France, veut « mettre la laïcité au même niveau que l’égalité, la liberté et la fraternité » dans la Constitution

Création : 21 octobre 2020
Dernière modification : 20 juin 2022

Autrice : Anaïs Faucher, étudiante en master 2 droit de l’Union européenne à l’Université de Lille, sous la direction de Jean-Paul Markus, professeur de droit public à l’Université Paris-Saclay

Source : RTL, le 18 octobre 2020

Le principe de laïcité figure déjà à l’article 1er de la Constitution et possède la même valeur juridique que la liberté, l’égalité et la fraternité. Vouloir l’insérer dans notre devise ou dans d’autres articles de notre Constitution aurait probablement une valeur symbolique, mais n’apporterait rien en droit.

Anaïs Faucher, étudiante en master 2 droit de l’Union européenne à l’Université de Lille, sous la direction de Jean-Paul Markus, professeur de droit public à l’Université Paris-Saclay, le 20 octobre 2020

C’est dans le contexte dramatique du meurtre de Samuel Paty, enseignant d’histoire-géographie effroyablement assassiné après avoir montré des caricatures de Mahomet dans le cadre d’un cours d’éducation civique, que la question de la laïcité s’est à nouveau imposée au cœur du débat public. Le président de la région Hauts-de-France, Xavier Bertrand, s’est exprimé à ce sujet et s’est déclaré partisan d’une modification de la Constitution par référendum afin de « mettre la laïcité au même niveau que l’Egalité, la Liberté et la Fraternité ». Une proposition de loi constitutionnelle a été soumise en ce sens.

« Liberté, Egalité, Fraternité » est la devise nationale française depuis plus de 150 ans et figure au sein de notre Constitution (article 2). Les trois composantes de cette devise ont chacune valeur constitutionnelle.

La liberté et l’égalité sont consacrées au sein de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, dès l’article premier (« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits »). La fraternité quant à elle s’est récemment vu reconnaître une valeur constitutionnelle par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 6 juillet 2018 à l’occasion d’une affaire concernant l’aide aux migrants. Ces valeurs font donc partie de ce qu’on appelle en droit le ”bloc de constitutionnalité”.

Qu’en est-il du principe de laïcité ? Découlant au départ de la loi de séparation des Églises et de l’État de 1905, ce principe figure désormais à l’article premier de notre Constitution : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ».

C’est pourquoi, bien que ne figurant pas dans notre devise, la laïcité a valeur constitutionnelle. Elle s’impose donc tout autant que la liberté, l’égalité et la fraternité au pouvoir législatif (qui ne pourrait par exemple créer des écoles publiques confessionnelles), au pouvoir exécutif (par exemple dans l’organisation des établissements d’enseignement), ainsi qu’aux particuliers dans les relations sociales (c’est-à-dire hors sphère privée, mais à l’école). Ainsi, insérer la laïcité dans la devise nationale aurait assurément une fonction symbolique, mais cela ne changerait rien en droit.

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