Variole du singe : Bill Gates n’a jamais prédit d’épidémie
Auteur : Nicolas Kirilowits, journaliste
Relectrice : Clara Robert-Motta, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Etienne Merle, journaliste
Source : Post Facebook, le 16 août 2024
Visiblement très bien informé, le fondateur de Microsoft aurait « annoncé la variole du singe en mai 2022 », affirme un post Facebook. Une fausse nouvelle qui circule en réalité depuis des années sur les réseaux sociaux et qui ressurgit après l’annonce de l’OMS d’une situation d’urgence par rapport au mpox.
Bill Gates, le roi de l’informatique serait aussi, vous ne le saviez peut-être pas, le maître des horloges du calendrier pandémique mondial. Enfin c’est ce croient certains internautes, rois, eux, de la désinformation. Alors que l’OMS s’inquiète de la recrudescence du nombre de cas de mpox (aussi appelée variole du singe), au point de déclencher “une urgence de santé publique de portée internationale”, les publications et les fausses rumeurs se multiplient autour de cette nouvelle épidémie.
Ainsi un groupe Facebook a relayé, seulement deux jours après l’alerte émise par l’OMS, une déclaration du médecin Christian Perronne, faite début juillet dans une interview au site Kairos, affirmant que “Bill Gates avait annoncé la variole du singe en mai 2022”. Une allégation mensongère et ancienne comme le prouve ces nombreux articles de fact-checking (AFP, Le Monde, dpa, TF1) datés d’il y a deux ans.
Une fausse nouvelle remâchée
Tout part d’un exercice de simulation de crise sanitaire organisé par l’ONG américaine Nuclear Threat Initiative (NTI) en mars 2021. Durant cet exercice destiné à des “leaders actuels et passés”, les participants devaient suivre un scénario et proposer des solutions au fur et à mesure. Le but de cette situation fictionnelle : s’exercer afin de réduire les menaces biologiques à haut risque dans le futur.
Or, cet exercice misait sur un scénario de crise sanitaire causé par la variole du singe (mpox) débutant en mai 2022 pour se propager progressivement durant des mois.
Quelques mois après cet exercice, en mai 2022, une épidémie de mpox s’est effectivement déclarée, provoquant déjà à l’époque une alerte internationale de l’OMS. Il n’en fallait pas plus évidemment pour que certains croient enfin tenir la preuve absolue que l’épidémie, comme celle du Covid19 avant elle, était orchestrée par quelques puissants, dont Bill Gates.
Le père de Microsoft est accusé, à travers sa fondation, d’être l’un des financeurs du Nuclear Threat Initiative, organisatrice de l’exercice de simulation. Il est vrai que la fondation Bill et Melinda Gates finance, en partie, le NTI. Précisons, que la fondation Gates s’inscrit dans une longue liste de financeurs comme le prouve le dernier rapport annuel de l’ONG.
Le hasard comme coupable
Pour éteindre les rumeurs, NTI affirmait en mai 2022, dans un communiqué de presse et une série de Questions/Réponses que “le fait que plusieurs pays connaissent actuellement une épidémie de variole du singe est une pure coïncidence”.
Pour le NTI le choix de la variole du singe s’explique simplement par une question de vraisemblance dans les scénarios. “Les risques posés par la variole du singe sont bien documentés depuis des années par de multiples autorités de santé publique ; les informations contenues dans notre scénario fictif ne sont pas nouvelles.”
De fait, comme l’explique notamment l’Institut Pasteur sur son site Internet, la mpox ou variole du singe “a été isolée pour la première fois en 1958, au sein d’une colonie de singes à Copenhague, au Danemark”.
Désireuse de permettre aux participants de son scénario fictif “de discuter des améliorations urgentes à apporter aux capacités mondiales de prévention et de réponse aux pandémies.”, l’ONG américaine assure avoir “choisi la variole du singe parmi une série d’options proposées” par ses experts. Autrement dit, sauf preuve contraire, seul le hasard peut être incriminé ici. D’ailleurs, le NTI avait également organisé des simulations en 2019 et 2020.
Aussi, à toutes fins utiles, rappelons que Christian Perronne, l’auteur de la déclaration sur laquelle se base la publication mensongère, a été démis de ses fonctions au sein de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP) en décembre 2020 pour “des propos considérés comme indignes de la fonction qu’il exerce” en lien avec la pandémie de la Covid19. Cet article de Conspiracy Watch retrace par ailleurs une série de controverses le concernant. En voilà une de plus.
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