Valérie Pécresse : ”il y aura dans la Constitution le fait que nul ne peut se prévaloir de son origine ou de sa religion pour échapper à la loi commune”
Dernière modification : 23 mars 2022
Auteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay
Secrétariat de rédaction : Emma Cacciamani et Yeni Daimallah
Source : La Provence, 20 mars 2022
Ancienne conseillère d’État, Valérie Pécresse sait probablement mieux que quiconque combien ce qu’elle propose figure déjà dans notre Déclaration des droits de l’homme.
Valérie Pécresse : ”il y aura dans la Constitution le fait que nul ne peut se prévaloir de son origine ou de sa religion pour échapper à la loi commune”
Valérie Pécresse, candidate LR à l’élection présidentielle, a longtemps siégé au Conseil d’État, et sait probablement mieux que d’autres combien sa proposition n’a aucune utilité juridique, puisque la Constitution lui donne déjà raison. À titre de révision salutaire, citons plusieurs articles de notre Déclaration des droits de l’homme :
Article 1er : “Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune”.
Article 4 : “La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits”.
Article 6 : “La Loi (…) doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents”.
Article 10 : ”Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi”.
Nul besoin de périphrases. Valérie Pécresse peut déjà faire son marché parmi ces textes, pour exclure tout privilège au nom de la religion.
Les risques à triturer et délayer la Constitution pour de simples redites
La Constitution permet déjà d’appréhender les situations que dénonce Valérie Pécresse. La modifier pour répéter ce qui existe déjà, c’est affaiblir son caractère de texte de référence. N’infligeons pas à notre Constitution ce qui a déjà été infligé à la loi : une logorrhée législative dont le Conseil d’État lui-même s’alarme, et dont une des conséquences est que de plus en plus de lois restent inappliquées ou inapplicables.
Selon Montesquieu, “il est quelquefois nécessaire de changer certaines lois. Mais le cas est rare ; et, lorsqu’il arrive, il n’y faut toucher que d’une main tremblante”. À méditer.
Contactée, Valérie Pécresse n’a pas répondu à nos sollicitations.
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