Rémi Noyon, CC 2.0

Selon Marine Le Pen sur BFM-TV, l’Union européenne empêche d’augmenter le SMIC

Création : 3 février 2020
Dernière modification : 20 juin 2022

Auteur : Vincent Couronne, docteur en droit, chercheur associé au laboratoire VIP, université Paris-Saclay

Source : BFM TV, 2 février 2020

La fixation du salaire minimum relève des seuls États membres de l’Union, et pas de l’Union elle-même. Ce n’est donc pas grâce au Brexit que le Royaume-Uni a pu augmenter de 6% son salaire minimum, mais parce que la majorité au pouvoir l’a voulu. D’ailleurs si Marine Le Pen devient présidente, aucun texte ni aucun juge européens ne l’empêcheront d’augmenter le SMIC. Mieux encore, les députés RN peuvent d’ores et déjà proposer une revalorisation substantielle, puisque seule la loi française fixe le taux du SMIC.

Invitée sur BFM-TV dans BFM Politique, Marine Le Pen était attendue sur la question du Brexit, ayant défendu pendant de longues années une sortie de la France de l’Union européenne. Elle affirme que grâce à cette sortie de l’Union, le Premier ministre Boris Johnson a pu augmenter le salaire minimum de 6 % pour atteindre 8,72 livres, soit 10,24 euros.

Peut-être que l’existence d’un marché intérieur européen dans lequel les travailleurs et les prestataires de services peuvent circuler librement exerce une pression à la baisse sur les salaires et ne permet pas, par réalisme économique, à un Gouvernement d’augmenter le salaire minimum. C’est une question économique sur laquelle nous ne nous prononcerons pas, étant parfaitement incompétents en la matière.

Du point de vue du droit, là où pour le coup nous avons quelque chose à dire, il faut rappeler que l’Union européenne n’empêche pas les États membres d’augmenter le SMIC. D’ailleurs, le Royaume-Uni n’avait pas de salaire minimum avant 2016, et être membre de l’Union ne l’a pas empêché d’en créer un. De même en Allemagne en 2014.

La raison est simple : l’article 151 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne prévoit que les États membres et l’Union « conscients des droits sociaux fondamentaux », ont pour objectif « l’amélioration des conditions de vie et de travail ». Deux articles plus loin, au 153, il est précisé que la politique de l’Union ne peut en aucun cas porter sur la rémunération. En d’autres termes, l’Union doit laisser libre les États de fixer le niveau de leur SMIC. Une résolution du Parlement européen de 2016 contre le dumping social rappelait d’ailleurs cette compétence des États (voir paragraphe AB).

Pour autant, la nouvelle Commission européenne présidée par Ursula von der Leyen a lancé une consultation des partenaires sociaux afin de réfléchir à des outils permettant une rémunération plus équitable des travailleurs dans l’Union. La décision finale ne pourra en aucun cas être une harmonisation du SMIC en Europe, car cela serait contraire aux traités de l’Union. La Cour de justice de l’Union européenne, chargée d’assurer le respect des traités, y veille avec attention (voir les points 123 et 124 de sa décision).

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