Selon Emmanuel Fernandes (LFI), le refus de nommer Lucie Castets Première ministre est un “coup d’État institutionnel”
Dernière modification : 9 septembre 2024
Auteur : Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public à l’Université de Poitiers
Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public à l’Université Paris-Saclay
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Guillaume Baticle
Source : Compte X d'Emmanuel Fernandes, 23 juillet 2024
Contrairement à ce que prétend le député LFI Emmanuel Fernandes, le refus de nommer dans l’immédiat un nouveau Premier ministre ne constitue pas un “coup d’État institutionnel”.
Lors de son intervention à 20h sur France 2, le Président de la République a affirmé qu’il ne nommerait pas de nouveau gouvernement avant la fin des JO, “à la mi-août”, indiquant par là qu’il ne nommerait pas Lucie Castets Première ministre.
Selon le député de la France Insoumise (LFI) Emmanuel Fernandes, en se comportant de la sorte, Emmanuel Macron aurait commis un “coup d’État institutionnel”. En réalité, le Président de la République n’a pas méconnu la Constitution.
Pour contester la position du Président de la République, les membres du Nouveau Front Populaire (NFP) invoquent des précédents politiques. Jusqu’à présent, à l’issue de chaque élection législative le Président a toujours nommé un Premier ministre bénéficiant du soutien de la formation politique arrivée en tête des élections législatives. Sauf qu’en France les précédents politiques, à l’instar de la tradition républicaine, n’ont aucune valeur juridique. Pour le dire autrement, ils ne lient le pouvoir politique que dans la mesure où il entend y souscrire.
Cela tient à l’article 8 alinéa 1er de la Constitution qui se borne à prévoir que “[l]e Président de la République nomme le Premier ministre”. Sans plus de précision. D’un strict point de vue juridique, si rien ne s’opposait à ce qu’Emmanuel Macron nomme Lucie Castets – la personne désignée par le Nouveau Front Populaire (NFP) –, rien ne l’obligeait non plus. Aussi bien aurait-il pu décider de nommer un Premier ministre proposé par le centre et la droite, voire désigné par personne mais ayant sa préférence personnelle (Sophie Marceau, Yannick Noah, Thomas Pesquet…).
Aucun « coup d’État institutionnel » par conséquent, dans la mesure où la Constitution n’a pas été méconnue par le Président de la République. Les Français ne vivent donc pas une dictature présidentielle. Si le Gouvernement dirigé par Gabriel Attal est maintenu en fonction « jusqu’à la mi-août », il ne peut qu’expédier les affaires courantes (autrement dit : gérer le quotidien et l’urgence, mais pas réformer le pays) sous peine de s’exposer à des recours en justice. Quant à Emmanuel Macron, si « à la mi-août » il nomme un Premier ministre n’ayant pas la confiance d’une majorité des députés de l’Assemblée, le Gouvernement qui sera constitué pourra être renversé, dès la rentrée, par une motion de censure (article 50 de la Constitution).
Suite à la remarque d’un lecteur, une coquille a été corrigée.
Une erreur dans ce contenu ? Vous souhaitez soumettre une information à vérifier ? Faites-le nous savoir en utilisant notre formulaire en ligne. Retrouvez notre politique de correction et de soumission d'informations sur la page Notre méthode.