Quelle protection légale contre les atteintes aux biens ou à la personne des élus locaux ?

Création : 12 juillet 2023

Auteur : Guillaume Baticle, master de droit public, Université de Picardie Jules Verne

Relectrice : Isabelle Muller-Quoy, maître de conférence en droit public, Université de Picardie Jules Verne

Secrétariat de rédaction : Emma Cacciamani et Loïc Héreng



Un élu local bénéficie d’une obligation légale de protection de la part de sa collectivité, face aux violences et aux menaces qui le visent, et aussi en cas d’accident ou de poursuites en justice. Mais tout ce dispositif protège en aval en cas de dommage, sans éviter les risques…

Dans un contexte d’émeutes partout en France, les élus, à l’instar du maire de l’Haÿ-les-Roses (92) dont le domicile a été incendié et la famille molestée, sont visés par des menaces et des violences. Leur statut d’élu local leur octroie une protection particulière, même s’il n’évite pas le risque. Ce régime est calqué sur la protection légale des agents publics telle qu’elle résulte du Code de la fonction publique.

C’est aux collectivités territoriales qu’il revient de protéger leurs élus menacés ou victimes de violences

Le Code des collectivités territoriales (article L2123-35) prévoit qu’une commune doit tout mettre en œuvre pour protéger ses élus contre les « violences, outrages ou menace » dont ils pourraient être victimes. Cette protection est étendue aux conjoints, parents et enfants des élus concernés. La commune est tenue de réparer le préjudice subi par l’élu ou sa famille et peut poursuivre en justice les auteurs. Il en va de même à l’échelle du département (article L3123-29) et de la région (article L4135-29), à ceci près que la protection n’est pas étendue à la famille des élus concernés.

Par exception, si l’élu d’une commune est victime de violences en qualité d’agent de l’État (en officiant lors d’un mariage par exemple), l’État sera responsable et non la commune.

De plus, la loi dite « séparatisme » de 2021 crée un délit de « mise en danger de la vie d’autrui par diffusion d’informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d’une personne ». Les peines sont aggravées si cela concerne un agent dépositaire de l’autorité publique, ce qui est le cas des élus. Les auteurs encourent cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende (article 223-1-1 du Code pénal).

Une protection étendue à d’autres hypothèses

En cas d’accident subi dans l’exercice de ses fonctions par un maire, la commune est responsable (article L2123-31 du Code général des collectivités territoriales) et doit verser lui des indemnités afin de réparer l’intégralité du préjudice subi. Cela inclut  non seulement les dépenses médicales (lorsqu’elles ne sont pas prises en charge par la sécurité sociale), mais également la rémunération non perçue en cas d’incapacité totale de travail. Il en va de même de l’élu départemental, régional ou communautaire.

La collectivité territoriale n’est cependant pas responsable si l’accident est dû à l’imprudence de l’élu, ou si cet accident n’est pas en lien avec sa fonction. Ainsi, la collectivité n’est pas tenue de dédommager l’élu qui se blesse lors d’une séance d’escalade en vacances !

La collectivité est aussi tenue de couvrir les condamnations civiles frappant l’élu, c’est-à-dire des dommages et intérêts qu’il aura été condamné par un juge à verser à une personne, en raison d’un acte commis dans le cadre de sa fonction (Conseil d’État, 5 mai 1971). De même, si l’élu fait l’objet de poursuites pénales en lien avec un acte commis dans l’exercice de ses fonctions (par exemple des poursuites pour homicide involontaire du fait du dysfonctionnement d’un équipement de la commune), la commune prend en charge les frais de justice et les dommages intérêts éventuels. En cas de condamnation pénale en revanche, l’amende pénale sera à la charge de l’élu, tout comme, le cas échéant, la peine d’emprisonnement. 

Une protection réparatrice, mais pas préventive

Concrètement donc, la protection de l’élu intervient surtout en aval : une fois les menaces et violences subies, par la prise en charge des frais. En amont, c’est à la police nationale ou à la gendarmerie qu’il appartient de protéger les élus, éventuellement la police municipale. Mais comment protéger 36 000 maires et leurs adjoints, les centaines d’élus départementaux et régionaux, etc. ?

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