Pour Jean-Luc Mélenchon, “Mathilde Panot n’est plus protégée par l’immunité parlementaire en vigueur depuis 1789”
Auteur : Guillaume Baticle, doctorant en droit public
Relecteur : Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public à l’Université de Poitiers
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Aya Serragui
Source : Compte X de Jean-Luc Mélenchon, 30 avril 2024
Mathilde Panot a été légalement convoquée, sans contrainte aucune sur un parlementaire. S’il faut comprendre que Jean-Luc Mélenchon souhaite modifier les textes pour interdire à la police judiciaire de convoquer un parlementaire en cas de soupçon de délit, libre à lui de proposer une réforme au Parlement.
La présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot, a été convoquée et entendue ce jeudi 2 mai par la police judiciaire dans le cadre d’une enquête pour apologie du terrorisme. Lui sont reprochés des propos tenus en soutien aux Palestiniens peu après les attentats du 7 octobre. Réagissant à cette convocation, Jean-Luc Mélenchon estime que la cheffe de file des députés LFI n’est plus protégée par son immunité parlementaire. Après un député de son groupe qui qualifiait cette convocation d’atteinte à la séparation des pouvoirs et que nous avons surligné, Jean-Luc Mélenchon va plus loin en affirmant que l’immunité parlementaire de Mathilde Panot n’existe plus. C’est faux.
L’immunité parlementaire n’empêche pas d’être convoqué
En France, l’immunité parlementaire trouve son fondement à l’article 26 de la Constitution : “Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions“. Il y aurait eu atteinte à l’immunité parlementaire de la députée si elle avait été arrêtée et mise en examen pour ses propos. En l’occurrence, ce n’est pas le cas puisqu’elle a seulement été convoquée pour être interrogée. De plus, elle pouvait décider de ne pas déférer à la convocation sans que la justice ne puisse la contraindre.
L’immunité ne protège toutefois plus le parlementaire s’il prononce des paroles pénalement répréhensibles (injures, calomnies, appels à la haine, par exemple) en dehors de l’Assemblée, et cela, même s’il s’exprime en tant que parlementaire. Cette immunité peut être levée si le bureau de l’Assemblée nationale en décide ainsi à la demande du juge, selon le deuxième alinéa de l’article 26 précité. À la suite de la levée de son immunité, il peut être poursuivi, même s’il s’exprime, par exemple dans les médias, en tant que parlementaire.
Changer la Constitution pour renforcer l’immunité parlementaire
Jean-Luc Mélenchon semble en réalité souhaiter une extension de l’immunité telle qu’elle est régie en droit français. Il faudrait donc, à l’entendre, que l’immunité parlementaire protège les députés et sénateurs, y compris des convocations dans le cadre des enquêtes. Libre à lui, par l’intermédiaire des députés de La France Insoumise, de proposer une révision de l’article 26 de la Constitution pour y mentionner qu’aucun membre du Parlement ne peut être convoqué par l’institution policière pour des opinions émises dans l’exercice de leurs fonctions. En attendant, la Constitution a bien été respectée.
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