Non, WikiLeaks n’a jamais indiqué détenir des preuves impliquant Barack Obama dans un réseau pédophile
Autrice : Maylis Ygrand, journaliste
Relecteur : Etienne Merle, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Clara Robert-Motta, journaliste
Source : Compte Facebook, le 8 mai 2025
Selon certains internautes, Julian Assange aurait récemment affirmé que WikiLeaks détenait des preuves de l’implication de l’ancien président des États-Unis dans un réseau pédophile. Pourtant, cette information est entièrement fausse et cette rumeur qui circule depuis déjà plusieurs années a commencé avec un canular.
De quoi faire les gros titres. À en croire certains internautes, Julian Assange aurait affirmé que « WikiLeaks a désormais la preuve tangible que l’ancien président, Barack Hussein Obama, a opéré et participé à un réseau pédophile basé à la Maison-Blanche ».
Mais cette « bombe », comme ils le décrivent, est fausse. Julian Assange n’a jamais tenu de tels propos et ce n’est pas la première fois que cette infox circule. Parcours d’une fake news.
Interview datée et sans rapport
À en croire la capture d’écran diffusée par certains internautes, l’allégation du fondateur de WikiLeaks aurait été prononcée sur FoxNews, la chaîne télévisée câblée la plus regardée aux États-Unis. Mais après vérification, Les Surligneurs n’ont trouvé aucune trace récente d’interview de Julian Assange, ni sur le site de Fox News, ni dans aucun autre média crédible.
Et pour cause : une recherche d’image inversée effectuée à partir de la capture d’écran révèle qu’il s’agit en réalité d’une image ancienne, déjà présente en ligne depuis plusieurs années.
Les résultats mènent à une vidéo bien réelle : même présentateur (le commentateur politique américain Sean Hannity), mêmes vêtements, même décor — tout correspond. L’image provient donc d’une interview datant de septembre 2016.
Or, dans cette interview, Julian Assange ne formule absolument aucune accusation selon laquelle Barack Obama aurait été impliqué dans un réseau pédophile à la Maison Blanche. La capture d’écran a donc été manipulée pour faire croire à une déclaration inexistante, en s’appuyant sur un extrait authentique sorti de son contexte.
D’ailleurs, WikiLeaks n’a jamais mis au jour une telle affaire concernant l’ancien président états-unien. En plus de n’avoir rien publié à ce propos sur leur site, ils avaient déjà débunké cette fake news auprès de l’AAP, en juin 2024.
Contacté par Les Surligneurs, WikiLeaks ne nous avait pas répondu lors de la publication de cet article.
Il était une fois un site de désinformation
Mais alors d’où vient cette désinformation ? Certaines publications diffusées en ligne citent comme source le site undergroundreportorg.wordpress.com. Sur ce dernier, Les Surligneurs ont en effet retrouvé un article daté du 20 février 2017 intitulé « WikiLeaks : Obama a dirigé un réseau de pédophiles à partir de la Maison-Blanche ». Les premières lignes sont similaires aux propos repris par certains internautes.
Mais ce site n’est pas un média d’information, comme l’ont déjà démontré des organisations de vérification de faits. Un article de PolitiFact met en lumière la supercherie de ce site. Il s’agirait d’un plaisantin qui s’amusait à écrire de fausses histoires afin de tester la crédulité du public. Comme le rapportent nos confrères de Lead Stories, il avait d’abord créé un premier site où apparaît notamment le faux article sur Barack Obama, puis il en avait créé un deuxième qui n’est aujourd’hui plus accessible.
Ce n’est pas la première fois que l’ancien président démocrate est victime de ce type d’infox. En mai 2023, un papier de The Associated Press débunkait que non, Barack Obama n’avait pas « retiré 500 000 pédophiles d’une base de données de vérification des antécédents ». Deux mois plus tard, nos confrères de Reuters démentaient que l’ancien locataire de la Maison-Blanche avait déclaré que « les pédophiles méritaient les mêmes droits que la communauté LGBTQ+ ».
Pizzagate et QAnon
Barack Obama n’est pas le seul démocrate victime de cette désinformation. Au cœur de la campagne présidentielle de 2016, une théorie du complot visait notamment le directeur de campagne d’Hillary Clinton, John Podesta. Les partisans du « Pizzagate » affirmaient qu’un réseau de pédophilie s’organisait dans une pizzeria de Washington.
Cette fake news était justement née après que WikiLeaks ait révélé des courriels du directeur de campagne de l’ancienne candidate démocrate à la présidentielle, mais dont aucun ne fait référence à un quelconque réseau pédophile. Cette désinformation est notamment reprise dans la mouvance QAnon, dont les partisans sont convaincus qu’une élite mondiale se livrerait à un trafic d’enfants. Le tout, sans aucune preuve à l’appui.