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Une voiture Tesla garée à une borne de recharge pour véhicules électriques, le 12 juin 2025, à Corte Madera, en Californie. (Justin Sullivan / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP)

Non, une étude ne révèle pas que les voitures électriques durent en moyenne trois ans contre douze pour celles à essence

Création : 19 septembre 2025

Autrice : Maylis Ygrand, journaliste 

Relectrice : Clara Robert-Motta, journaliste

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétariat de rédaction : Maylis Ygrand, journaliste

Source : Compte Facebook, le 14 juillet 2025

Des internautes arguent que les voitures électriques ne dureraient en moyenne que trois ans contre douze pour celles à essence. Mais ces moyennes concernent en réalité la durée d’utilisation et non de vie des véhicules. D’après une récente étude britannique, les durées de vie des voitures électriques et thermiques seraient similaires.

La voiture électrique, pas écologique pour un sou ? D’après certains internautes, une étude aurait révélé que les voitures électriques durent en moyenne trois ans, contre douze pour celles à essence.

Ils en veulent pour preuve plusieurs articles de presse (ici ou ici), publiés tous deux en juillet 2025, qui titrent : « “C’est un désastre écologique annoncé” : une étude révèle que les voitures électriques durent en moyenne à peine 3 ans contre 12 pour l’essence ».

Sauf que, relayé de toutes parts, le titre de ces articles est trompeur. L’étude en question s’intéresse aux durées d’utilisation et non de vie des voitures.

Une étude de 2023

« Aguicheur » serait l’adjectif poli. C’est ce qui a attiré l’œil des internautes… la promesse d’un scoop : la voiture électrique, officiellement élue fausse bonne idée écologique. Pourtant, une fois la titraille dépassée, même les articles des sites boostés à l’intelligence artificielle sur lesquels se basent cette rumeur précisent bien qu’il ne s’agit pas de la durée de vie en tant que telle des véhicules.

En 2023, le rapport de S&P Global Mobility constatait que « l’âge moyen des véhicules électriques à batterie aux États-Unis est de 3,6 ans cette année, contre 3,7 ans l’année dernière ». En parallèle, un des graphiques présents dans l’étude indiquait que l’âge moyen des voitures de particuliers était de 13,6 ans. Rien ne précise pour autant s’il s’agit de toutes les voitures de particuliers, électriques inclus, ou seulement des thermiques.

D’après l’étude, pour les voitures électriques, « la moyenne d’âge oscille entre 3 et 4 ans depuis 2017 et est en grande partie comprimée à mesure que les inscriptions de nouveaux véhicules électriques à batterie continuent d’augmenter ». Autrement dit : au vu du nombre important de nouvelles voitures électriques intégrant la flotte états-unienne chaque année, la moyenne d’âge de cette dernière ne peut grandement s’élever.

Malgré cela, « l’âge moyen des véhicules électriques à batterie est sous pression car elles quittent la flotte plus rapidement que leurs homologues ICE et diesel ». Sur le constat, le contenu des articles de presse est donc vrai. La durée d’utilisation des véhicules électriques restait en 2023 moindre, comparée à celle des voitures thermiques.

Un âge moyen de 3,7 ans

Autre point terminologique sensationnaliste. Les articles qui « révèle[rait] » ce « désastre écologique » s’appuient sur une étude de S&P Global Mobility qui date de 2023. L’entreprise états-unienne spécialisée dans les données sur l’ensemble du cycle de vie automobile possède des données plus récentes car elle publie chaque année une étude sur l’âge moyen des véhicules en circulation aux États-Unis (comme ici en 2024, ou là en 2025).

En 2025, S&P Global Mobility constate simplement que « le type de propulsion du véhicule influence également la courbe globale de vieillissement ».

Dans le cas des voitures électriques « pour la première fois depuis plusieurs années, il y a eu une pression à la hausse sur l[eur] âge moyen alors que leur taux de croissance des ventes ralentit ». Ainsi, l’âge moyen particulièrement bas des voitures électriques était donc en partie plombé par leur caractère nouveau sur le marché.

Néanmoins, toujours selon l’étude de 2025, « l’âge moyen des véhicules électriques à batterie reste bas à 3,7 ans, augmentant à un rythme similaire — environ deux mois — comme le marché global en 2024 ». Autrement dit : vu que le nombre de nouvelles voitures électriques diminue globalement, il aurait été cohérent que l’âge moyen de ces véhicules augmente conséquemment. Comme cela n’est pas le cas, cela laisse supposer qu’en 2025, la durée d’utilisation des voitures électriques reste moindre par rapport aux voitures thermiques.

Si cette étude est circonscrite à un état des lieux de la flotte états-unienne, le constat est quasiment le même en France. Selon une étude du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) publiée en 2024, la durée d’utilisation moyenne  d’une voiture électrique à disposition des ménages est de 4 ans quand celle des voitures thermiques s’établit à 12.

Des catégories socio-professionnelles supérieures surreprésentées

Si les raisons ne semblent pas clairement identifiées, le rapport du Cerema souligne que, parmi les « actifs occupés conducteurs de voiture électrique, les catégories socio-professionnelles supérieures sont très nettement surreprésentées : 44% des conducteurs de voiture électrique appartiennent aux CSP+, un pourcentage nettement supérieur à celui des autres conducteurs et de l’ensemble de la population de référence, où seulement 28% des actifs occupés font partie des CSP+ ».

Cela pourrait traduire, selon l’étude, que « le coût d’acquisition des voitures électriques est encore trop élevé pour une partie de la population ». Qui dit catégorie socio-professionnelle supérieure, dit pouvoir d’achat supérieur.

D’après l’étude S&P Global Mobility de 2025, « les prix des véhicules neufs et d’occasion restent élevés, encourageant davantage les propriétaires de véhicules à conserver leurs voitures plus longtemps et à investir dans l’entretien plutôt que dans le remplacement ». Mais en fonction de leur pouvoir d’achat, les consommateurs ne sont pas tous égaux face à cette contrainte.

Les voitures électriques restant apparemment encore réservées aux personnes ayant un plus grand pouvoir d’achat, cela pourrait donc en partie expliquer que la durée d’utilisation des voitures électriques soit moindre par rapport à celles des voitures thermiques. En effet, les pratiques de consommation (réparer au lieu de racheter, par exemple) peuvent différer en fonction de ses moyens.

Une durée de vie similaire

En parallèle, une étude britannique, publiée en janvier 2025, s’est intéressée à la longévité des différents types de véhicules grâce à l’analyse des données issues des contrôles techniques obligatoires en Grande-Bretagne.

Or, « les véhicules électriques à batterie offrent des caractéristiques prometteuses, avec une durée de vie moyenne de 18,4 ans, ce qui se rapproche de celle d’un véhicule à essence moyen. Il est important de noter que les véhicules électriques à batterie dépassent les voitures à essence en termes de kilométrage, couvrant 124 000 miles sur toute leur durée de vie ».

Ainsi, selon l’étude, « bien que les premiers véhicules électriques aient présenté une fiabilité inférieure à celle des véhicules à moteur à combustion interne, les progrès technologiques rapides ont permis aux nouveaux véhicules électriques à batterie d’atteindre une durée de vie comparable, même dans des conditions d’utilisation plus intensive ».

Autrement dit, la durée de vie des voitures électriques serait, d’après cette étude, maintenant similaire à celle des véhicules thermiques. Si la durée d’utilisation reste, elle, moindre, cela semble désormais lié aux modes de consommation.