Non, l’échec du vote d’une résolution au Parlement ukrainien n’a pas entrainé la fin du mandat de Volodymyr Zelensky
Auteur : Hugo Guguen, juriste
Relecteur : Etienne Merle, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Fanny Velay, journaliste stagiaire
Source : Compte Facebook, le 24 février 2025
Faute de voix suffisantes, le Parlement ukrainien n’a pas adopté, le 24 février 2025, une résolution réaffirmant la légitimité de Volodymyr Zelensky. Cette résolution symbolique, sans impact sur son mandat, a été de nouveau soumise dès le lendemain aux députés qui, plus nombreux ce jour-ci, l’ont adoptée.
Le rideau tombe-t-il sur la présidence de Volodymyr Zelensky ? Certains internautes en sont persuadés. « ‘C’est une gifle : ses jours sont comptés’ : le Parlement ukrainien sonne le glas de la présidence Zelensky. Les députés ont rejeté un texte stipulant que le chef d’État pouvait ‘exercer ses pouvoirs jusqu’à ce que le nouveau président élu de l’Ukraine prenne ses fonctions’ », célèbre un utilisateur X.
Ils en veulent pour preuve le rejet par le Verkhovna Rada d’Ukraine (le Parlement ukrainien) d’un projet de résolution d’une déclaration sur le soutien à la démocratie en Ukraine dans le contexte de l’agression de la Fédération de Russie.
Les députés de l’institution avaient, en effet, été appelés le 24 février 2025 à voter sur la résolution, mais cette dernière n’a pas atteint la majorité, à huit voix près. Pourtant, ce refus est loin de sonner le glas de la présidence de Volodymyr Zelensky.
Une simple déclaration symbolique
En effet, il ne s’agit pas d’une loi, mais d’une déclaration symbolique. Plus précisément, il s’agit d’une réponse directe aux propos tenus par Donald Trump qualifiant son homologue ukrainien de « dictateur sans élections ».
En raison du contexte diplomatique tendu entre les États-Unis et l’Ukraine, le Verkhovna Rada a ainsi tenté de réaffirmer la légitimité de Volodymyr Zelensky, par le biais d’une prise de position officielle de ses parlementaires.
La résolution soumise au vote entend réaffirmer que Volodymyr Zelensky est le chef d’État de l’Ukraine et qu’il exerce ses fonctions conformément à la première partie de l’article 108 de la Constitution ukrainienne, et ce, jusqu’à la prise de fonction d’un nouveau président élu.
« Le texte avait avant tout une portée symbolique. L’objectif était de faire une déclaration politique, et non de traiter la question de la légitimité de Zelensky », explique Vadym Halaychuk, député ukrainien sous la bannière « Serviteur du peuple », le parti de Volodymyr Zelensky, contacté par Les Surligneurs.
Cette résolution, numérotée n°13039, proposait également de souligner l’impossibilité d’organiser des élections pendant la loi martiale, et que ces dernières seront organisées dès qu’une « paix globale, juste et durable sera assurée » en Ukraine.
Une résolution adoptée en deux temps
Mais le coup de com’ a tourné au vinaigre. La résolution n’a pu être adopté le 24 février, les députés du camp présidentiel n’ayant pas obtenu le seuil des 226 voix, synonyme de majorité. Pour autant, aucun député n’a voté contre cette résolution, comme le montre le compte rendu du vote par appel nominal.
En revanche, selon les médias ukrainiens, un nombre important de députés étaient répertoriés « absents », et près d’une cinquantaine de ces absents appartenaient au parti de Volodymyr Zelensky.
Le député Ukrainien Oleksandr Merezhko, dans une interview de ABC News, a confirmé que cet échec n’était pas dû à l’impopularité de Volodymyr Zelensky, mais au fait que « de nombreux membres du Parlement n’étaient pas encore revenus de leurs circonscriptions ».
L’opposition a également joué sa partition pour mettre en échec ce premier vote. Les députés du parti d’opposition Solidarité européenne de l’ancien président ukrainien, Petro Porochenko, étaient en effet présents, mais n’ont pas participé au vote.
« Malheureusement, nous n’avons pas réussi à mobiliser suffisamment de voix et avons manqué les 226 votes requis de huit voix », reconnait le député ukrainien Vadym Halaychuk.
Mais la partie n’est pas terminée. Le lendemain, le 25 février, les députés ukrainiens ont eu la possibilité de voter à nouveau sur ce même texte. Présents en plus grand nombre, ils l’ont cette fois adopté sans difficultés : 268 voix pour et pas une seule voix contre.
La vitesse à laquelle les députés ukrainiens ont pu voter à nouveau sur ce texte est due au fait qu’il s’agit d’une résolution symbolique et non d’un projet de loi visant à modifier le droit ukrainien.
« Les résolutions, contrairement aux projets de loi, sont adoptées selon une procédure plus simple, sans deux lectures, amendements, etc. C’est pour cela que les députés ont pu revoter sur ce même texte le lendemain qui, cette fois-ci, a atteint le nombre de voix nécessaire », explique le député ukrainien aux Surligneurs.
« La propagande s’est immédiatement emparée de cet échec pour l’utiliser comme un signe de doute sur la légitimité de Zelensky. C’est pourquoi nous avons enregistré une nouvelle résolution, pratiquement identique, et l’avons soumise au vote le lendemain, les règles de procédure pour cela sont assez légères, donc c’était simple. Cette affaire est ainsi devenue un bon exemple de l’efficacité de la propagande et de la prudence qu’il faut avoir lorsqu’on fait des déclarations politiques ! Au final, nous avons créé un problème au lieu de le résoudre », conclut Vadym Halaychuk.