#FactCheck. Non, le nombre de cancers du sein chez les femmes de moins de 45 ans n’explose pas aux États-Unis
Auteur : Nicolas Kirilowits, journaliste
Relectrice : Clara Robert-Motta, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Sasha Morsli Gauthier
Source : Compte Facebook, 16 mai 2024
Voilà une hausse qui a de quoi effrayer les jeunes femmes américaines. En 2023, elles seraient près de 300 000, âgées de moins de 45 ans, à avoir développé un cancer du sein, contre 47 000 un an plus tôt, affirme la publication. Soit une multiplication par six en l’espace d’un an. « Quelque chose de gros se passe« , conclut le post. Et en effet, quelque chose de « gros » se passe.
Après s’être perdus dans les méandres des statistiques de santé américaines, les Surligneurs sont en mesure d’affirmer, sans nier la portée de données déjà élevées pour les vies qui se cachent derrière, qu’il s’agit, à minima, d’une grosse erreur.
Si nous n’avons malheureusement pas eu de réponses à nos sollicitations de la part de l’American Cancer Society, dont la publication dit tirer ses chiffres, le libre accès à leurs données annuelles nous a tout de même permis de vérifier la véracité numérique du cas qui nous occupe.
Les plus jeunes davantage épargnées
Et en 2023, comme l’indique le premier tableau de cette présentation statistique sur les chiffres des cancers aux États-Unis, ce sont bien 297 790 femmes qui ont été diagnostiquées porteuses d’un cancer du sein (se référer à la ligne « Breast« ). Or, contrairement à ce qu’indique le post Facebook, il n’est nullement précisé ici un échantillonnage selon l’âge. De fait, les données concernent toutes les femmes du pays, peu importe leur âge. Autrement dit, dans le cas présent, nous faisons face à une utilisation incorrecte d’éléments statistiques.
Sur une autre page concernant les données 2024, soit les plus récentes, l’organisation américaine précise par ailleurs que sur l’estimation totale de nouveaux cas, qui s’élève à plus de 310 000, « Un très petit nombre de femmes diagnostiquées avec un cancer du sein ont moins de 45 ans« .
Des faits qui peuvent être entièrement corroborés, d’une part, par les chiffres de l’Institut national du cancer américain, ou encore par ceux du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une agence de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Celle-ci révèle notamment qu’en 2022, 31 000 américaines diagnostiquées avec un cancer du sein avaient moins de 45 ans. Sur un échantillon total de près de 275 000 personnes, cela correspond à un panel d’environ 11 %. De la même manière, contacté par Les Surligneurs, l’Institut national du cancer en France rappelle que « 80 % des cancers du sein se développent après 50 ans« . Une statistique qui correspond encore à celles du CIRC sur son site Internet.
Taux de mortalité en baisse
Si l’ensemble n’en reste pas moins évidemment élevé – 670 000 personnes sont décédées du cancer du sein dans le monde selon l’OMS en 2022 – il n’est heureusement pas du même ordre que celui affiché sur Facebook.
Aussi, rappelons que la hausse du nombre de femmes diagnostiquées avec le cancer du sein, tout âge confondu, est nécessairement corrélé au développement des campagnes de dépistage.
Les bouleversements démographiques sont également des facteurs importants comme l’explique aux Surligneurs l’Institut national du cancer : « L’augmentation du nombre de cancers constaté entre 1990 et 2023 est principalement liée à des évolutions démographies (augmentation et vieillissement de la population)« . Et pour cause, l’âge médian au moment du diagnostic est de 64 ans en France, et 62 ans aux États-Unis.
Ainsi, le taux de mortalité se révèle, dans ce cas, pertinent pour mesurer l’évolution, inquiétante ou non, d’un cancer. « Dans les pays à revenu élevé, le taux de mortalité par cancer du sein standardisé selon l’âge a chuté de 40 % entre les années 1980 et 2020« , affirme à cet égard sur son site Internet l’OMS. Une statistique confirmée par l’American Cancer Society qui détaille qu’entre 1989 et 2021, le taux de mortalité pour le cancer du sein aux États-Unis a diminué de 42 %. Même tendance en France, avec une « baisse de 1,6 % par an entre 2010 et 2018« , d’après les données publiées par l’Institut national du Cancer.
L’Institut qui nous rappelle par ailleurs, en forme de conseil, que « d’autres facteurs de risques […] sont à prendre en compte. Il s’agit de comportements et habitudes de vie, sur lesquels nous pouvons agir, qui majorent le risque de développer la maladie : consommation excessive d’alcool et de tabac, surpoids, manque d’activité physique. »
Ainsi, chaque année en France, près de 8 000 nouveaux cas du cancer du sein seraient dus à l’alcool, 4 500 au surpoids et à l’obésité, 2 700 à un traitement hormonal ou à la pilule, ou encore 2 500 au tabac.
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