Crédit : Nikolay Georgiev

Non, la plupart des étudiants étrangers ne restent pas en France après leurs études

Création : 29 octobre 2024

Autrice : Lili Pillot, journaliste

Relectrice : Clara Robert-Motta, journaliste

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétariat de rédaction : Maylis Ygrand, journaliste

Source : Compte Facebook, le 20 octobre 2024

Sur ses réseaux sociaux, Éric Zemmour a affirmé que l’essentiel des étudiants étrangers restait en France après leurs études, relayant un de ses passages sur LCI. C’est faux, selon Campus France et un rapport de l’OCDE.

“Il faut réduire drastiquement l’immigration étudiante”, affirme Éric Zemmour sur ses réseaux sociaux. Invité dimanche 20 octobre sur le plateau de LCI, le président du parti Reconquête! a déclaré vouloir réduire à quelques centaines le nombre d’étudiants étrangers en France. En partageant son passage télévisé sur les réseaux sociaux, il a assuré que la plupart d’entre eux restaient en France après leurs études.

Si la position d’Éric Zemmour sur ce sujet n’étonne pas, l’affirmation selon laquelle la majorité des anciens étudiants étrangers restent en France après leurs études interroge. Est-elle vraie ? Contacté pour connaître sa source, le polémiste d’extrême droite n’a pas répondu à notre sollicitation.

D’après nos recherches, il s’avère que c’est plutôt l’inverse qui se produit.

Un retour majoritaire dans le pays d’origine

Ce qu’évoque Éric Zemmour ici, c’est le taux de rétention des étudiants internationaux. Et contrairement à ce qu’il avance, ce chiffre est loin d’être élevé en France. Pour le savoir, on peut regarder si les étudiants étrangers ont obtenu un autre titre de séjour après avoir fait leurs études. Selon le rapport de l’OCDE “Perspectives des migrations internationales 2022”, 40 % des titulaires d’un permis d’étude entre 2016 et 2018 ont obtenu un autre type de permis en 2019. C’est donc moins de la moitié.

Une fois diplômé, plus leur dernière année de formation s’éloigne, moins les anciens étudiants vont avoir tendance à rester dans le pays où ils ont étudié. Toujours selon le rapport de l’OCDE, sur l’ensemble des personnes titulaires d’un permis d’études en 2010, seuls 20 % étaient encore en France dix ans plus tard, en 2020. Certains sont restés parce qu’ils ont trouvé du travail, d’autres pour des raisons familiales.

Ces résultats de l’OCDE sont corroborés par une enquête de l’établissement public, Campus France, qui promeut l’enseignement supérieur français à l’étranger. “Le taux de maintien en France des étudiants internationaux ayant fini leurs études est de deux sur 10 à dix ans, d’un tiers à sept ans, de la moitié à quatre ans”, résume l’étude, parue en mai 2024, sur le parcours des étudiants internationaux formés en France.

Dans ce dossier, qui a recueilli les réponses de 10 000 répondants, le constat est le même : plus la dernière année d’études s’éloigne dans le temps, plus le retour vers le pays natal est majoritaire. Ainsi, si pour les trois dernières promotions (2020-2023), la France arrive en tête des pays de résidence, elle est très rapidement dépassée par le pays d’origine puis par les autres pays. Par exemple, pour les promotions entre 1984 et 2004, les trois quarts du temps, les anciens étudiants sont retournés vivre dans leur pays d’origine.

Un apport de 1,35 milliard d’euros à l’économie française

Face à un Éric Zemmour catégorique, la journaliste de LCI l’interroge. “Ces étudiants ne sont-ils pas aussi une richesse en termes d’échange, pour l’avenir ?” La réponse du polémiste d’extrême droite ? Une anecdote selon laquelle le roi du Maroc aurait dit à Nicolas Sarkozy, alors président, à propos d’étudiants marocains : Vous ne devriez pas les accueillir, ce sont les plus mauvais qu’on vous envoie”. Traduction : les étudiants étrangers n’apporteraient pas une si grande richesse au pays hôte.

La source d’Éric Zemmour est introuvable. Selon Campus France, en revanche, on constate plutôt l’inverse. La plupart du temps, les étudiants qui s’expatrient pour poursuivre leurs études sont issus de prestigieuses formations. Y compris pour le Maroc.

Contacté, Campus France nous confirme que les étudiants étrangers marocains se distinguent justement par leur haut niveau. “Excellents en maths et en physique — notamment grâce à un réseau de classes préparatoires scientifiques au Maroc —, les étudiants marocains brillent chaque année aux concours des meilleures écoles d’ingénieurs françaises, comme l’École polytechnique et CentraleSupélec. En 2023, sur 60 admis internationaux au concours d’entrée à Polytechnique, 41 étaient marocains.”

Cette richesse issue de l’arrivée d’étudiants étrangers sur le sol français est également mise en lumière dans une autre enquête de Campus France. En 2022, l’agence de l’État avait établi qu’ils rapportaient 1,35 milliard d’euros à l’économie française. Dans le détail, ils dépensaient en moyenne 867 euros par mois.

En comparaison aux autres pays attractifs pour les étudiants internationaux, comme le Canada ou les États-Unis, la France fait office de mauvais élève pour retenir les talents qu’elle a formés.

 

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