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Giorgia Meloni, portrait officiel. licence Creative Commons Attribution 3.0 Italie. Governo.it

Non, Giorgia Meloni n’a pas exigé la démission d’Ursula von der Leyen

Création : 23 juillet 2025
Dernière modification : 24 juillet 2025

Autrice : Clarisse Le Naour, double cursus L3 science politique et L3 droit public à l’université Lumière Lyon II

Relecteur : Etienne Merle, journaliste

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétariat de rédaction : Etienne Merle, journaliste

Source : Compte X, le 22 juillet 2025

Contrairement à ce qu’affirment certaines publications sur les réseaux sociaux, Giorgia Meloni n’a jamais exigé la démission d’Ursula von der Leyen. La vidéo relayée en ligne évoque un sommet européen imaginaire et déforme les positions réelles de la femme d’État italienne qui reste globalement alignée sur les réformes portées par la présidente de la Commission européenne. 

Le 10 juillet 2025 dernier, une motion de censure déposée par des eurodéputés d’extrême droite à l’encontre d’Ursula von der Leyen a été rejetée par le Parlement européen. Ce texte s’inscrivait dans un climat de défiance lié notamment à l’affaire dite du « Pfizergate », concernant des échanges de SMS entre la présidente de la Commission et Albert Bourla, PDG de Pfizer, durant la pandémie de Covid-19.

Dans ce contexte, une vidéo publiée sur YouTube et repartagée massivement à partir du 22 juillet affirme que Giorgia Meloni, la Présidente du Conseil des ministres d’Italie, aurait, lors d’un prétendu sommet européen, exigé la démission de la présidente de la Commission en l’accusant d’avoir conclu des « accords secrets avec des lobbys pharmaceutiques, notamment Pfizer, et avec des puissances étrangères, notamment les États-Unis ». Or, cette vidéo est trompeuse à plusieurs titres.

Sommet européen fantôme

Tout d’abord, aucun sommet européen ne s’est tenu à la date mentionnée, le 16 juillet 2025. L’agenda officiel du Conseil de l’Union européenne, accessible en ligne, ne fait état d’aucune réunion de ce type à cette date. L’événement invoqué est donc purement fictif.

Par ailleurs, Giorgia Meloni n’a pas soutenu la motion de censure visant Ursula von der Leyen. Si deux des partis de sa coalition – la Ligue de Matteo Salvini et Forza Italia – ont voté en sa faveur, le parti Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni, membre du groupe des Conservateurs et réformistes européens (ECR), ne l’a ni initiée ni soutenue. Elle a estimé qu’une telle initiative était inopportune et contre-productive.

Alliance de circonstance

Cette position s’explique également par les équilibres politiques actuels à Bruxelles. Ursula von der Leyen s’appuie sur des alliances ponctuelles avec Giorgia Meloni pour faire passer certaines réformes, notamment sur les questions migratoires. En retour, Meloni voit dans cette coopération un levier pour renforcer le contrôle des frontières, une priorité de son gouvernement.

Comme le souligne Vincent Couronne, docteur en droit européen et enseignant à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye et directeur des Surligneurs : « Elles ont besoin l’une de l’autre : Ursula von der Leyen compte sur Giorgia Meloni pour bâtir des majorités droite-extrême droite au Parlement européen, tandis que Meloni s’appuie sur Ursula von der Leyen pour renforcer la lutte contre l’immigration en Italie ».

En résumé, aucune déclaration publique, ni aucun fait documenté, ne permet d’affirmer que Giorgia Meloni a exigé la démission d’Ursula von der Leyen. Et quand bien même, elle l’aurait fait, une telle décision ne relève pas des chefs d’État ou de gouvernement des États membres, mais exclusivement du Parlement européen, conformément à l’article 234 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Il s’agit d’une procédure exceptionnelle, strictement encadrée, comme l’ont déjà rappelé Les Surligneurs.