Non, cet article du Monde sur l’augmentation du nombre de cancers ne fait pas de lien avec « l’ARN messager » ou les vaccins
Autrice : Clara Robert-Motta, journaliste
Relectrice : Maylis Ygrand, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Clara Robert-Motta, journaliste
Source : Florian Philippot sur X, le 27 septembre 2025
La Une du journal « Le Monde » sur une explosion du nombre de cancers est partagée en dénonçant les « ravages des injections ARN messager ». L’article scientifique sur lequel il est basé, lui, ne fait pas de lien avec une vaccination, mais note une grave augmentation de ces maladies depuis plus de trente ans, dû en majorité au vieillissement.
Comme toujours avec l’économie de l’attention, plus c’est court et percutant, plus ça marche. Quitte à tronquer des informations pour ne garder que ce qui confortera la thèse voulue. C’est ce biais de confirmation, qui flirte (au bas mot) avec la manipulation, qui s’est joué avec la Une du quotidien Le Monde, qui annonçait « Le nombre de cancers explose dans le monde ».
Pour certains, pas besoin de lire plus loin que ces huit mots, la réponse est limpide : « Depuis les 13 milliards d’injections du poison des vaccins expérimentaux à + de 5 milliards d’humains le nombre de cancers explose ! Même les torchons [vraisemblablement Le Monde, ndlr] le reconnaissent ! », croit dénoncer un internaute.
Pour l’homme politique, Florian Philippot, cette explosion de cancers relatée par Le Monde dont il partage une photo de la Une sur X serait due aux « ravages des injections ARN messager ! ».
Pourtant, ce qui est présenté comme la cause d’une explosion de cancers n’a rien à voir avec les conclusions des chercheuses et chercheurs qui dénoncent la hausse vertigineuse de ces maladies, non pas depuis l’introduction du vaccin anti-Covid ou de vaccins à ARN messagers… mais depuis plus de trente ans.
Commencer par tout lire
Même pas besoin d’ouvrir le journal, sur la Une partagée par les internautes, la réponse est déjà là. Sous le titre « Le nombre de cancers explose dans le monde », on peut lire plusieurs points saillants de l’article. On y explique déjà que l’article se base sur un rapport publié le 25 septembre 2025 dans The Lancet qui montre que « entre 1990 et 2023, le nombre de nouveaux cas de cancer a plus que doublé ».
Cette temporalité est importante au vu des remarques des internautes. En effet, on connaît l’existence de l’ARN messager depuis les années 60, ce n’est qu’à la fin de l’année 2020 que le premier vaccin utilisant l’ARN messager — pour l’immunisation contre le Covid-19 — arrive sur le marché avec les vaccins de Pfizer-BioNTech et de Moderna. Aucun lien ne peut donc être réalisé entre l’augmentation des cancers depuis le début des années 90 et les vaccins à ARN messager.
Contrairement à ce qui est raconté, l’article du Lancet sur lequel est tiré le papier du Monde précise bien les causes. Réalisé par plus de 1 300 chercheurs, le rapport montre l’évolution de ces maladies au cours des trente dernières années et propose des projections jusqu’en 2050.
Une augmentation liée au vieillissement de la population
Entre 1990 et 2023, le nombre de nouveaux cas de cancer déclarés « a doublé », écrit Le Monde, pour atteindre 18,5 millions, et en 2050, 30,5 millions de nouveaux cas de cancers pourraient être déclarés. « La plupart de ces augmentations sont majoritairement dues au changement démographique », écrivent les auteurs.
« Ces augmentations prévisionnelles du nombre de décès sont plus importantes dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire (+90,6 %) que dans les pays à revenu élevé (+42,8 %) », rapportent-ils encore.
Point intéressant, les auteurs de l’étude notent qu’entre 2015 et 2030, la probabilité de mourir d’un cancer entre 30 et 70 ans devrait baisser de 6,5 %.
Ces données chiffrées n’ont pas empêché des personnalités, dont l’émergence médiatique est liée à un positionnement antivaccination contre le Covid, de sauter sur l’occasion de faire dire à la Une d’un grand journal ce qu’elle ne disait pas afin de promouvoir leur agenda.