Marseille : La supposée vidéo d’actualité sur un “règlement de compte” a en fait trois mois

Dire que Marseille est une ville dangereuse, c’est un peu comme dire que Paris est une ville romantique. Voilà des poncifs auxquels ne goûtent que très peu les locaux mais qui font réagir les réseaux sociaux, toujours friands d’idées reçues.

Rien d’étonnant alors de voir un compte Instagram publier, lundi 15 juillet, une vidéo pour le moins angoissante, et déjà commentée près de 150 fois, où l’on perçoit des personnes courir pour échapper à ce qui est décrit comme “un règlement de compte en direct dans un centre commercial”.

Il est en revanche beaucoup plus inhabituel de constater, après quelques recherches sur Internet, que personne — si ce n’est donc notre utilisateur — n’évoque cette information. À l’heure du tout info et du fait divers en boucle, il paraît improbable qu’une telle information puisse passer au travers des mailles du filet médiatique. Contacté par Les Surligneurs, Jérémy Attali-Pietri, rédacteur en chef adjoint d’Actu Marseille confirme qu’il n’a pas “remarqué de récent événement dans un centre commercial”.

Une vidéo qui remonte au mois d’avril

Un constat visiblement partagé par nombre de ses confrères. La Provence, La Marseillaise, BFM Marseille, France Bleu Provence ou encore France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur, aucun de ces médias – que l’on peut, sans parti pris, qualifier de sérieux et de bien informés – ne relaient d’information semblable.

Comment cela est-il possible ? Il semblerait, en réalité, que notre internaute ait connu un bug temporel. En effet, en creusant et en remontant dans le temps, nous retrouvons bien la trace, dans les médias cités, d’un fait divers dans un centre commercial de la deuxième ville de France.

Le 20 avril dernier exactement, une échauffourée impliquant une vingtaine de jeunes a entraîné un mouvement de foule dans la galerie commerçante nommée Grand Littoral. “Marseille : une rixe dans la galerie marchande du centre commercial Grand Littoral suscite un vent de panique”, titre par exemple La Provence le lendemain des faits. “Rixe au centre commercial Grand Littoral : que s’est-il passé ?”, s’interroge pour sa part BFM Marseille le 22 avril.

Une rapide recherche sur les réseaux sociaux permet d’ailleurs de retrouver d’autres vidéos, sous d’autres angles, de l’événement. On y constate que le mobilier du centre commercial est bien celui de la vidéo prétendument d’actualité et que les boutiques visibles dans ces courtes séquences respectent le même emplacement que dans le plan de la galerie commerciale.

De fait, en dépit des usages médiatiques, notre utilisateur, qui se décrit comme un “média” qui souhaite “montrer la réalité”, se garde de mentionner qu’il s’agit d’images du mois d’avril. La réalité oui, mais la réalité datée.

Une rixe sans conséquences graves

Par ailleurs, contrairement aux informations publiées en bandeau sur la vidéo, l’utilisation de l’expression “règlement de compte” semble ici inappropriée.

“Il s’agissait d’une rixe entre jeunes causée par un vol”, précise une employée du centre commercial contactée par Les Surligneurs. De surcroît, aucun article de presse ne reprend à son compte la même expression.

Quant aux dernières images où l’on voit un homme armé courir, plusieurs éléments interrogent ici. S’il semble s’agir du même centre commercial (le même type de poubelle visible sur l’un des plans apparaît également sur d’autres vidéos), les commentaires publiés en bandeau sur la vidéo changent, ce qui laisse suggérer un montage et le recours à deux séquences. Contacté, l’auteur de la publication n’a pas répondu à nos sollicitations.

Enfin, d’après les articles de presse accréditant l’événement, il n’est jamais stipulé la présence d’hommes armés mais “la rumeur de bruits de coups de feu”, écrit La Provence, causée par “les bruits du pot d’échappement” d’un scooter précise actuMarseille.

Voilà beaucoup d’approximations et d’incohérences pour ce prétendu média, qui, outre le partage de ces informations datées, semble spécialisé dans la confection de vêtements “dédiée à tous les amoureux de la France et fiers de leur appartenance à cette nation emblématique”.

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