Rémi Noyon, CC 2.0

Marine Le Pen a déclaré : « Je souhaite faire un référendum constitutionnel […] où j’indiquerai que toute loi nouvelle aura une autorité supérieure [aux traités européens] »

Création : 5 mai 2017
Dernière modification : 11 janvier 2024

Autrice : Laure Clément-Wilz

Source : Débat présidentiel, TF1 et France 2, 3 mai 2017, 22h35

La réforme constitutionnelle proposée par Mme Le Pen est difficilement réalisable d’un point de vue du droit constitutionnel et placerait la France en infraction du point de vue du droit de l’Union européenne.

Mme Le Pen propose d’organiser un référendum pour modifier la Constitution afin que toute loi nouvelle ait une autorité supérieure au droit de l’Union.

Du point de vue de la procédure envisagée pour la réforme, organiser directement un référendum implique de faire application de l’article 11 de la Constitution. La lettre de ce texte vise l’adoption d’une loi sans référence aux lois constitutionnelles. Cette disposition a bien été utilisée par le Général de Gaulle alors qu’il était Président de la République en 1962 pour faire adopter la révision constitutionnelle prévoyant l’élection du suffrage universel direct. Mais cette pratique a été largement critiquée dans sa légitimité en ce qu’elle contourne les pouvoirs du Parlement. Elle a d’ailleurs été suivie d’une motion de censure de la part de l’Assemblée, qui a été suivie de la décision de la dissoudre.

Du point de vue du contenu de la réforme, prévoir dans la Constitution que la loi primerait sur le droit de l’Union revient en réalité à revenir sur la jurisprudence la plus basique de la Cour de cassation et du Conseil d’État, par laquelle ces deux juridictions ont accepté de contrôler la compatibilité d’une loi avec les stipulations d’un traité international, même lorsque la loi est postérieure à l’acte international en cause, en application de l’article 55 de la Constitution.  Autrement dit, la réforme constitutionnelle préconisée ne pourra se faire sans une modification ou une suppression de ce dernier article.

En tout état de cause, une telle réforme constitutionnelle placerait la France en position de violation flagrante du droit de l’Union européenne, et plus particulièrement du principe de primauté du droit de l’Union sur le droit interne posé en 1964 par la Cour de justice des Communautés européennes, y compris sur le droit constitutionnel, principe qui a pour effet de rendre inapplicable tout règle nationale contraire, y compris si elle est postérieure. L’adhésion à ce principe tel qu’interprété par la Cour a été réitérée par l’ensemble des États membres à l’occasion de la signature du traité de Lisbonne.

 

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