L’Union européenne obligerait la France à fixer la TVA sur les abonnements au gaz et à l’électricité à 20 %
Dernière modification : 22 octobre 2024
Autrice : Léa Houssain, Master 2 Droit international et droit européen à Lille
Relecteurs : Vincent Couronne, docteur en droit européen, enseignant à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye
Etienne Merle, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Maylis Ygrand, journaliste
Source : Compte Facebook, le 14 octobre 2024
Selon certains internautes, l’Union européenne impose à la France de multiplier par quatre la TVA sur les abonnements au gaz et à l’électricité. C’est faux. Si l’UE fixe des seuils en la matière, les États ont aussi une bonne marge de manœuvre.
Parmi les solutions envisagées pour diminuer la dette publique de l’État, le projet de loi de finances (PLF) de l’exécutif français prévoit la fin de la TVA réduite sur les abonnements au gaz et à l’électricité.
Cette dernière serait donc multipliée par 4 en 2025, passant d’un taux de 5,5 % à un taux de 20 %. Cette nouvelle a suscité de nombreuses réactions, notamment de la part de personnalités politiques.
Florian Philippot, le président du parti politique les Patriotes et ancien député européen, a dénoncé cette mesure sur les réseaux sociaux en affirmant que « L’UE oblige la France à ‘multiplier par 4 son taux de TVA’ sur les abonnements de gaz et d’électricité ».
Il semble donc pertinent de revenir sur ces propos puisque non, l’UE ne force pas ses États membres à augmenter leur TVA, même si elle impose un cadre à respecter.
Seuils limites
En matière de politique fiscale, les États membres de l’Union européenne conservent, de manière générale, une grande partie de leur compétence.
Concernant la TVA en revanche, l’UE dispose d’une compétence plus étendue. Objectif affiché : assurer le bon fonctionnement du marché intérieur, ce dernier relevant de la compétence partagée de l’Union avec les États membres au sens de l’article 4 du TFUE.
Pour cela, le Conseil de l’UE a mis en place en 2006 une directive afin d’éviter des taux de TVA trop discordants entre les États. Cette directive fixe un seuil minimal du taux normal de la TVA, en deçà duquel les États ne peuvent pas descendre : il est fixé à 15 %.
En revanche, il n’y a pas de limite maximale. Chaque État est libre de fixer son taux normal de TVA au-delà de 15 %. C’est le cas par exemple de la Hongrie qui a choisi de fixer son taux de TVA normal à 27 %. En France, ce dernier est à 20 %.
Et il en va de même pour les taux réduits. En France, certains secteurs ou catégories de produits bénéficient d’une TVA plus avantageuse. C’est le cas notamment des denrées alimentaires, des produits de protection hygiénique, des livraisons de logements sociaux neufs, d’équipement et des services pour personnes en situation de handicap ou encore… des abonnements au gaz et à l’électricité !
Comme pour le taux normal, l’UE fixe un seuil minimum à ces taux réduits : 5 %. Mais là encore, elle ne fixe pas de seuil maximal. Ce dernier est laissé à la discrétion des États. En théorie, rien n’oblige donc la France à augmenter son taux de TVA sur les abonnements de gaz et d’électricité.
Taux haut ou taux bas ?
En revanche, une jurisprudence de la Cour de Justice européenne du 18 janvier 2018 indique que les États ne peuvent pas avoir de taux différent pour des éléments indissociables du même bien mis à la consommation.
Autrement dit, le droit européen impose que les TVA sur l’abonnement et la consommation d’électricité et de gaz bénéficient du même taux. La preuve que l’UE n’a pas laissé le choix au Gouvernement ? Pas vraiment !
Car un autre choix aurait été possible : celui de baisser la TVA du gaz et de l’électricité pour que son taux atteigne 5,5 % et soit identique à celui des abonnements. Une proposition que le Gouvernement n’a pas retenue et dont il est le seul décisionnaire.
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