Lecture : Quand le droit est utilisé pour faire avancer la cause environnementale
Auteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay
Secrétariat de rédaction : Loïc Héreng, Yeni Daimallah et Emma Cacciamani
Une recension de l’ouvrage Justice pour la planète, 5 combats citoyens qui ont changé la loi, par L. de Redon et E. Javelaud, préf. A. Bougrain Dubourg, Editions de l’Atelier, 2022.
Voici un condensé très bien fait de la manière dont les défenseurs de l’écologie ont utilisé le droit et la procédure pour influencer les politiques publiques et faire avancer la cause environnementale, concret et accessible aux non-juristes. Pas moins ! D’autant que c’est ce que nous enseignons tous à nos étudiants : le droit se fait aussi dans les juridictions, même si c’est au prix d’un combat judiciaire à la fois obstiné et coûteux.
À celles et ceux que rebute la lecture d’un traité de justice environnementale (nous avons même des références en anglais pour les férus), cet ouvrage allie les explications d’un juriste et d’une sociologue, à partir de grandes affaires qui ont défrayé la chronique. L’affaire du naufrage du pétrolier Erika en 1999 (marée noire en Bretagne), avec son bilan environnemental catastrophique, aura malgré tout permis au juge, pour la première fois et bien avant la loi, de reconnaître un “préjudice écologique”, plus de onze années après les faits. Et les auteurs de se réjouir de ce que le Parlement soit intervenu en 2016 pour graver ce préjudice “dans le marbre de la loi”, tout en déplorant qu’il en ait profité pour réduire fortement les potentialités du texte, en bridant le mécanisme d’indemnisation.
Vient ensuite le cas de l’ourse Cannelle, abattue par un chasseur en 2004 : un désastre judiciaire toutefois selon les auteurs, les magistrats n’ayant pas utilisé l’arsenal juridique dont ils disposaient pour réprimer ce délit – au contraire du chasseur qui utilisa le sien contre l’Ourse !
L’affaire des faucheurs d’OGM, celle de Notre-Dame-des-Landes, plus récentes et encore dans les mémoires, ont contribué à élargir la portée du principe de précaution, ainsi que celle du développement durable. Dans le cas du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, ce n’est toutefois pas le juge qui fut en pointe, mais plutôt les militants sur place (les “zadistes”), venus à bout de la volonté gouvernementale. Le juge sera forcément conduit à en tenir compte pour les cas suivants de “ZAD”, ce qui a commencé avec le fameux “triangle de Gonesse” d’ailleurs. L’ouvrage se termine sur “l’affaire du siècle”, grand succès procédural pour l’instant, mais qui reste à concrétiser sur le fond, en termes de lutte effective contre la pollution.
Un utile glossaire se trouve à la fin pour les nuls en droit, ainsi qu’un encouragement à s’engager dans les associations écologistes, on aura compris qu’il s’agit d’un ouvrage engagé, mais très pédagogique.
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