Le député LFI-NUPES Antoine Léaument partage “Une pétition pour la destitution de Macron”
Auteur : Guillaume Baticle, master de droit public, Université de Picardie Jules Verne
Relecteur : Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public, Université de Poitiers
Secrétariat de rédaction : Emma Cacciamani
Source : Compte Twitter d’Antoine Léaument, 24 avril 2023
La destitution du Président de la République n’est décidée que par le Parlement réuni en Haute Cour, après une procédure assez lourde. Une pétition déposée dans ce but sur le site de l’Assemblée nationale pourrait en théorie permettre de déclencher la procédure de destitution, mais les chances sont proches de zéro.
Une pétition a été lancée par un citoyen sur le site de l’Assemblée nationale (une page est dédiée à cet effet) pour demander la destitution du Président de la République. Le député LFI-NUPES Antoine Léaument l’a partagée en fixant des objectifs quantifiés de signatures, dans les termes suivants : “Si elle passe les 100 000, on en parle en commission des Lois. Si elle passe 500 000, on en parle en hémicycle”.
Mais Antoine Léaument n’est probablement pas sans savoir que la procédure de destitution du Président de la République relève d’un autre régime juridique…
Le sort de cette pétition devant l’Assemblée
Cette pétition “pour la destitution du Président de la République” sera traitée par la commission des Lois. Un rapporteur sera désigné pour décider soit de son classement, autrement dit de la fin de la procédure, soit de lui donner suite en organisant un débat en commission. Si la pétition dépasse 500 000 votes, elle peut être débattue dans l’hémicycle, mais cela reste à la discrétion de la Conférence des présidents.
En cas de débat en hémicycle, un rapport parlementaire est rédigé, qui est alors inscrit à l’ordre du jour de l’assemblée afin d’être discuté, mais sans pour autant donner lieu à un vote. Libre aux parlementaires ou au gouvernement de déposer respectivement une proposition de loi ou un projet de loi reprenant les termes de la pétition. La procédure législative est donc totalement indépendante de celle de la pétition.
De façon générale, les citoyens peuvent déposer et signer des pétitions devant l’Assemblée nationale et le Sénat, conformément à une ordonnance relative au fonctionnement des assemblées. La procédure varie légèrement selon l’assemblée concernée, dont le règlement intérieur fixe les conditions d’enregistrement et d’examen des pétitions (Articles 147 à 151 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale et articles 87 et suivants de celui du Sénat). Dans la mesure où elles ne créent aucune obligation pour les parlementaires, elles reflètent simplement une demande ou une opinion émanant de certaines personnes.
La destitution du Président de la République par pétition n’existe pas
Sous la Ve République, il existe bien une procédure de destitution du Président de la République. Quelques fois utilisée mais sans jamais aboutir (contre Jacques Chirac en 2001 et François Hollande en 2016), elle est prévue par la Constitution. Le Président peut être destitué “en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat”. Seul le Parlement réuni en Haute Cour peut prononcer cette destitution. Pour cela, une des deux assemblées doit au préalable adopter à la majorité des deux tiers une proposition de réunion en Haute Cour et la soumettre à l’autre assemblée, qui doit aussi l’adopter. Si les deux chambres s’entendent, elles se constituent en Haute Cour, puis celle-ci statue sur le sort du Président de la République.
Cette procédure est à distinguer de celle devant la Cour de justice de la République dont le rôle est de juger les membres du gouvernement pour des infractions (délits ou crimes) commises dans l’exercice de leurs fonctions.
Cela signifie que la pétition mise en ligne sur le site de l’Assemblée nationale et relayée par n’a d’autre objet, si les objectifs de signatures sont atteints, que de demander aux députés de proposer la réunion du Parlement en Haute Cour, afin de prononcer la destitution du Président.
À bon entendeur donc : il y a une bonne distance à parcourir entre la signature et la destitution du Président.
Contacté, le député n’a pas répondu à notre sollicitation.
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