La Belgique prend-elle la présidence de l’Union européenne à partir du 1er janvier ?
Republication et mise à jour d’un article du 3 janvier 2023
Auteur : Vincent Couronne, docteur en droit européen, chercheur associé au centre de recherches VIP, Université Paris-Saclay
Secrétariat de rédaction : Guillaume Baticle
Au 1er janvier 2024 et pour une durée de six mois, la Belgique ne prend pas la présidence de l’Union européenne, mais plus modestement du Conseil de l’Union européenne, sorte de sénat européen qui réunit les ministres des États membres pour adopter, aux côtés du Parlement européen, la législation de l’Union. La Belgique ne dirigera donc pas l’Union dans son ensemble. Formellement, il n’existe d’ailleurs pas de présidence de l’Union européenne.
C’est une musique qu’on entend tous les six mois à propos de l’Union européenne. Un État en prendrait la présidence tournante pour un temps déterminé, et présiderait donc aux destinées des 27 États membres et de leurs institutions européennes. On a ainsi pu lire l’année dernière sur le site de France Info un article intitulé “La Suède a pris la présidence de l’Union européenne pour six mois” et publié le 1er janvier 2023. CNEWS a aussi publié un article le même jour “La Suède prend la présidence tournante de l’Union européenne”. L’article cite d’ailleurs une députée européenne qui critique les “priorités de la présidence suédoise de l’UE”. Lorsque le tour était à la France en janvier 2022, l’exécutif français a lui-même entretenu la confusion, en adoptant l’acronyme “PFUE” (pour présidence française de l’Union européenne), tout en parlant de présidence française du Conseil de l’Union européenne dans sa communication officielle.
TOUS LES SIX MOIS, UN ÉTAT MEMBRE PREND LA PRÉSIDENCE DU CONSEIL DE L’UNION : PAS L’UNION ELLE-MÊME
La réalité est en effet quelque peu différente. Le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne prévoit que tous les six mois, un État membre prend la présidence non pas de l’Union européenne, mais du Conseil de l’Union européenne, une institution certes puissante mais qui n’est pas au sommet dans la hiérarchie des institutions européennes. Le Conseil est plutôt une sorte de chambre haute, de Sénat européen, réunissant des représentants des États membres (des ministres) pour adopter la législation de l’Union. Dans la plupart des cas, cette législation doit être négociée avec le Parlement européen, qui peut bloquer le processus. Le Conseil dispose de pouvoirs supplémentaires, notamment pour imposer des sanctions à des pays, comme la Russie ou l’Iran.
Au 1er janvier, donc, la Belgique prend la présidence tournante de ce Conseil de l’Union. Et encore, elle fait partie d’un trio d’États qui, pour une durée de 18 mois, assurent cette présidence à tour de rôle. Ces trois États définissent ensemble une feuille de route politique qu’ils souhaitent mettre en œuvre pour les 18 prochains mois. Mais pour ce faire, ils ont besoin du Parlement européen mais aussi de la Commission européenne, la seule habilitée à proposer une législation dans la plupart des cas. La Belgique s’est retrouvée dans un trio incluant l’Espagne et la Hongrie, qui se terminera donc le 31 décembre 2024.
C’est l’article 16 paragraphe 9 du Traité sur l’Union européenne qui impose une présidence tournante pour le Conseil. La durée et les modalités en trio de cette présidence ont été précisées par une décision du Conseil européen du 1er décembre 2009.
SEMPITERNELLES CONFUSIONS ENTRE LES “CONSEILS”
La confusion est assez facile en effet si on n’est pas très au fait du fonctionnement politique de l’Union européenne. Car il existe au-dessus de ce Conseil (que la presse appelle souvent “Conseil des ministres de l’Union européenne”), un Conseil européen qui, lui, ne réunit pas les ministres des États, mais les premiers ministres (ou les présidents pour certains États comme la France ou Chypre). Or ce Conseil européen dispose d’un président élu par ses membres pour 2 ans et demi, en la personne de Charles Michel.
S’il fallait parler de “président de l’Union”, c’est plutôt lui qu’il faudrait citer, puisque le Conseil européen impulse les orientations politiques de l’Union et lui donne un cap, un peu comme un président français. Mais cela serait une exagération, puisque Charles Michel ne décide pas seul de ces orientations, son rôle étant essentiellement de coordonner les réflexions des membres du Conseil européen.
Les Surligneurs avaient déjà écrit au sujet de la confusion, régulière, entre le Conseil et le Conseil européen, avec quelques pistes pour aider à y voir plus clair.
Ainsi, au 1er janvier 2024, et jusqu’au 30 juin, la Belgique préside le Conseil de l’Union européenne, et non l’Union européenne toute entière.
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