Jean Philippe Deniau (association de la presse judiciaire) : le ‘’huis clos (…) doit concerner tous les journalistes présents ou aucun d’entre eux’’

Création : 14 octobre 2022
Dernière modification : 5 juin 2023

Autrice : Audrey Darsonville, professeure de droit pénal, Université Paris Nanterre

Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay

Secrétariat de rédaction : Emma Cacciamani et Yeni Daimallah

Source : BFMTFV, 3 octobre 2022

L’admission d’un seul journaliste à l’audience lors d’un procès pour des faits de viol est certes une entrave à l’exercice de la profession de journaliste, mais c’est surtout la simple application des règles relatives au huis clos, et un droit des victimes parties civiles.

Le 3 octobre 2022, le procès de Christophe Karcher s’est ouvert devant la Cour d’assises du Bas-Rhin pour des crimes de viols à l’encontre de jeunes filles mineures lors des faits. Les parties civiles ont demandé le prononcé du huis clos pour cette audience mais ont accepté qu’un journaliste soit présent. La présence d’un unique journaliste choisi par les parties civiles a entraîné de vives protestations de la part des autres journalistes exclus de l’audience, dont celle de Jean Philippe Deniau, président de l’association de la presse judiciaire (APJ) qui n’a pas répondu à notre sollicitation.

La publicité des audiences est un principe fondamental, garant d’une justice transparente. Les citoyens, et donc les journalistes, peuvent librement assister aux audiences pénales. La publicité de l’audience est affirmée par le premier paragraphe de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, mais ce texte prévoit des exceptions en vertu desquelles l’accès de la salle d’audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès. Le but est notamment de garantir la protection de la vie privée des parties. Le droit français est aligné sur cette position. En effet, le Code de procédure pénale prévoit qu’en raison du caractère intime de l’infraction de viol, l’audience devant la cour d’assises peut se dérouler à huis clos. Cet article dispose que le huis clos est de droit si la victime partie civile le demande. Le principe demeure donc celui de la publicité des audiences, principe auquel seule la victime, si elle s’est constituée partie civile, peut décider d’y déroger. Le Conseil constitutionnel a déclaré que le dispositif prévu était conforme à la Constitution.

Le huis clos peut être total ou partiel. C’est à la victime d’en décider. Elle peut ainsi solliciter le huis clos pour le public, tout en souhaitant qu’il ne s’applique pas aux journalistes. Comme a pu le rappeler la Cour de cassation en 2005 et en 2014, c’est à la victime  de délimiter le champ d’application du huis clos. Par conséquent, même si cela peut sembler surprenant qu’un seul journaliste soit autorisé à assister au procès, cette situation est conforme à la jurisprudence. La seule logique qui préside en la matière est la protection de la victime, et donc le respect de son choix quant au public pouvant ou non assister au procès.


Cet article a été rédigé dans le cadre d’un événement organisé le jeudi 13 octobre, avec le soutien de l’OTAN, pour former les lecteurs des Surligneurs à la lutte contre la désinformation dans le domaine du droit. 

L’activité proposée était un événement en ligne d’une journée sous la forme d’un “legalthon” consacré à l’État de droit. RESILEX visait à rassembler des chercheurs en droit, des étudiants, des personnes d’influence, des journalistes et le grand public afin d’améliorer la résilience de la société dans le domaine de l’État de droit et de la démocratie. Les participants ont surveillé l’actualité et ont repéré les informations erronées ou les approximations juridiques présentes dans les propos des personnalités publiques. 

Les articles ont été rédigés et publiés en toute indépendance par les Surligneurs, selon la méthode utilisée pour tous les articles de legal-checking publiés sur le site. 

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Le 5 juin 2023, l’’explication de cet évènement a été modifiée dans le cadre de la mise en conformité des Surligneurs avec l’article 3.1.C du Code européen de fact-checking.

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