Frédéric Baab, procureur européen : “Il faut créer un Parquet vert européen”

Création : 3 juin 2022
Dernière modification : 6 juin 2022

Entretien réalisé par Vincent Couronne, docteur en droit européen, chercheur associé au centre de recherches VIP, Université Paris-Saclay

Propos retranscrits par Enzo Villet

Secrétariat de rédaction : Loïc Héreng et Emma Cacciamani

Crédit photo : Tous droits réservés Frédéric Baab

La lutte contre le réchauffement climatique et contre les atteintes à l’environnement s’intensifie de toutes part, et la justice n’est pas en reste. Mais les procès climatiques comme l’ « Affaire du siècle » en France ne sont sans doute pas suffisants pour obliger les gouvernements à respecter leurs engagements. D’où l’idée, défendue par Frédéric Baab, procureur au sein du nouveau Parquet européen, de créer un Parquet « vert » européen, dans un entretien pour Les Surligneurs.

 

Vincent Couronne : Est-ce que la justice climatique fonctionne ? Parce qu’on voit un peu partout des grands procès climatiques, avec de grandes affaires telle que l’Affaire du siècle, et des décisions nouvelles, parfois audacieuses, qui imposent aux États le respect d’obligations internationales, notamment l’Accord de Paris sur le climat. Est-ce que cette justice climatique est suffisante pour faire respecter les obligations des États ?

Frédéric Baab : En réalité cette justice climatique ne concerne que des recours qui portent uniquement sur les engagements pris par les pays pour prendre toutes les mesures nécessaires au respect des engagements pris tel que l’Accord de Paris sur le climat, comme le maintien du réchauffement climatique autour de 1,5 degrés. Sur ce fondement-là, vous avez un certain nombre de recours engagés parfois par des associations, c’est le cas aux Pays-Bas avec l’ONG Urgenda.

J’ai été président du tribunal de grande instance de Dunkerque dans le ressort duquel il y a la commune de Grande-Synthe qui s’est appuyée sur les objectifs fixés par l’Accord de Paris sur le climat pour obtenir une décision de justice très importante dans ce domaine. [dans cette décision du 1er juillet 2021, le Conseil d’État a enjoint au Gouvernement français de prendre des mesures supplémentaires d’ici le 31 mars 2022 pour atteindre l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40% d’ici 2030, NDLR]. Il y a l’ « Affaire du siècle », avec cette décision du tribunal administratif de Paris qui est dans la même veine, de nouveau on met l’État français face aux engagements qu’il a pris dans son plan carbone sur la période 2015-2018. Le tribunal administratif lui dit très clairement de prendre les mesures nécessaires pour compenser les manquements à ses propres engagements durant cette période. Ces différents recours et ces premières décisions recouvrent cette notion nouvelle de « justice climatique ».

Vincent Couronne : Je reviens sur votre proposition de la création d’un Parquet « vert » européen. En quoi est-ce qu’il serait complémentaire de la justice nationale ? Qu’est-ce que ça souligne comme lacune dans cette justice climatique qui n’est que nationale ?

 

L’idée est de passer d’un niveau de réponse purement national à un niveau de réponse européen en créant un Parquet « vert » européen

Frédéric Baab : L’idée est de passer d’un niveau de réponse purement national à un niveau de réponse européen en créant un Parquet « vert » européen, dont la compétence matérielle serait définie par la directive européenne sur la protection de l’environnement par le droit pénal. Ce Parquet européen à la compétence étendue serait donc chargé de poursuivre les infractions les plus graves à l’environnement.

On a besoin pour cela d’une directive européenne qui liste très précisément les infractions concernées et qui harmonise la définition des incriminations et le niveau des peines encourues. C’est un système que nous utilisons déjà pour le Parquet européen. Il est compétent pour poursuivre des infractions ou des fraudes au budget européen en vertu d’une directive de 2017 sur la protection des intérêts financiers de l’Union européenne par le droit pénal

De la même manière, on pourrait utiliser la directive pénale de 2008 sur la protection de l’environnement qui est en cours de révision. J’ai un souvenir très précis de cette première directive puisque je présidais à l’époque le groupe de travail dans lequel elle était négociée sous présidence française. À l’époque, j’étais le conseiller « justice pénale” du Représentant permanent français à Bruxelles et je me souviens que c’était une négociation importante, une première étape. Mais elle n’avait pas la même dimension que celle qu’elle prend aujourd’hui avec ce projet de révision qui va étendre son champ d’application de manière significative. Depuis, il y a eu une prise de conscience, qui fait que la négociation prend aujourd’hui une dimension politique nouvelle avec le « Green Deal », le Pacte vert européen, qui fait désormais de la protection de l’environnement et de la transition écologique et climatique une priorité politique très forte de l’UE, ce qui n’était pas le cas en 2008. Cette nouvelle directive va contenir une liste d’infractions à l’environnement qui couvrira un domaine assez vaste, dont une partie est en lien avec la criminalité organisée, comme les trafics de déchets, de bois ou d’espèces protégées, derrières lesquels vous avez souvent des mafias. Et pour une raison simple : c’est très lucratif et le risque pénal est très faible, contrairement au trafic de stupéfiants par exemple où le risque pénal est très élevé et la coopération internationale de bon niveau.

Vincent Couronne : Est-ce que c’est cette coopération européenne qui peut être la valeur ajoutée d’un Parquet vert européen ? Est-ce que le soutien qu’offrent l’Office européen de lutte anti-fraude, l’OLAF, ou encore Europol et Eurojust, sur des délits ou des atteintes à l’environnement transfrontalières, apportent une plus-value que n’a pas la seule justice nationale ?

Aujourd’hui la réponse pénale dans ce domaine est très faible

Frédéric Baab : C’est l’une des raisons pour lesquelles il faut transférer cette compétence au parquet européen. Vous avez d’abord tous les trafics qui portent directement atteinte à l’environnement. Vous avez aussi d’autres infractions intéressantes comme le rejet par les navires de substances polluantes ou la mise sur le marché de produits qui portent atteinte à l’environnement ou à la santé publique. Vous avez un champ d’application assez large qui couvre les atteintes les plus graves à l’environnement, pour lesquelles on doit être en mesure d’exercer des poursuites pénales effectives.

Aujourd’hui la réponse pénale dans ce domaine est très faible, si vous reprenez les statistiques dont on dispose dans ce domaine, celle du ministère français de la Justice, pour la période 2015-2019, les infractions environnementales représentent moins d’1 % des affaires pénales traitées. On retrouve le même taux (moins de 1%) au niveau d’Eurojust dont l’activité de coordination est le reflet de l’activité judiciaire au niveau national.

La conférence nationale des procureurs français a publié 10 propositions pour « le devenir de la justice pénale ». La proposition numéro 8 consiste à dépénaliser les infractions à l’environnement pour mieux les juger. Les procureurs disent très clairement que ce n’est pas leur cœur de métier, que ce ne sont pas les atteintes les plus graves à l’ordre social, et que ce sont des contentieux techniques. Il y a donc un choix de ne pas mettre ce sujet en priorité par la Conférence nationale des procureurs.

 

Si vous transférez la compétence au Parquet européen, la protection de l’environnement par le droit pénal devient une priorité d’action publique

 

Or si vous transférez la compétence au Parquet européen, la protection de l’environnement par le droit pénal devient une priorité d’action publique. Quand on a créé le Parquet européen actuel, c’est-à-dire spécialisé dans la protection des intérêts financiers de l’UE, on a multiplié par dix l’activité opérationnelle dans ce domaine en quelques mois. Au 31 décembre dernier, le Parquet européen avait ouvert, depuis sa création le 1er juin 2021, plus de 500 dossiers, représentant un préjudice au budget européen de 5,4 milliards d’euros. Il faut comparer ce chiffre à l’activité de l’OLAF, qui dans ses rapports annuels recommande des poursuites judiciaires dans un certain nombre de dossiers représentant en moyenne un préjudice au budget européen compris entre 300 et 500 millions d’euros. L’écart est considérable. En 7 mois nous avons multiplié par dix l’activité opérationnelle de l’OLAF en un an.

Comment est-ce possible ? Tout simplement parce qu’avec la création d’un Parquet européen, la protection des intérêts financiers de l’UE est devenue une priorité d’action publique.

Le Parquet européen a ouvert 45 dossiers en France

La situation française offre un autre exemple intéressant. Le Parquet européen a ouvert 45 dossiers en France et nous traitons 15 enquêtes déléguées, c’est-à-dire qui viennent d’autres États membres. Sur ce total, 4 dossiers seulement venaient des parquets français. Là encore on multiplie par 10 l’activité judiciaire dans ce domaine. Auparavant, ces dossiers faisaient soit l’objet d’un traitement purement administratif, et certains d’entre eux passaient même sous le radar. Le simple fait d’avoir créé ce Parquet européen apporte déjà une première réponse, il revivifie le système de détection des fraudes et la transmission de ces informations aux autorités judiciaires. 

Ce constat avait déjà été fait dans un rapport du Sénat en 2019 sur la fraude au fonds européen : il relevait la très faible efficacité du dispositif français en matière de détection des fraudes aux fonds européens, notamment dans le champ des dépenses. Cela tient notamment au fait que le système de gestion des fonds européens est parfois complexe et que la responsabilité en cas de fraude est diluée entre différents services. Il y a tout un système à mettre en place, notamment avec les Régions qui sont très impliquées dans la gestion des fonds européens. Nous construisons par ailleurs une coopération très étroite avec la Cour des comptes et les services de Bercy, en particulier le service d’enquête judiciaire des finances. Bref, c’est tout un dispositif qui se met en place pour alimenter le Parquet européen d’informations. 

Et il se passera exactement la même chose en matière environnementale. 

Vincent Couronne : J’allais justement vous demander si l’expérience, le travail accumulé du Parquet européen était déjà assez concluant pour espérer qu’un “Parquet vert” puisse être aussi efficace, et vous venez d’y répondre. On peut donc dire que transférer une compétence pénale au niveau européen permet d’en faire une priorité politique, surtout dans la politique pénale ?

Frédéric Baab : C’est exactement ça, sachant que d’une certaine manière le Parquet européen est déjà un “Parquet vert”, puisqu’un tiers du budget européen est consacré au Green Deal.

Nous représentons non pas un intérêt national, mais un intérêt européen

Mais il y a une autre idée derrière ce Parquet vert européen, c’est l’efficacité opérationnelle. Je vais vous donner un exemple que j’ai personnellement suivi lorsque j’étais membre national français au sein d’Eurojust. C’est le dossier de la fraude au moteur diesel de la marque Volkswagen. Eurojust a été immédiatement saisie, à la fois par la justice allemande, mais aussi par les autorités judiciaires d’autres États membres, dont la France, qui était représentée dans ce dossier par les juges d’instruction du pôle de santé publique de Paris. C’est un dossier complexe. Pour en maîtriser les tenants et aboutissants, vous devez avoir tous les éléments techniques pour comprendre comment cette fraude a été commise, vous devez aussi avoir une connaissance précise de la manière dont la direction de Volkswagen a pris ses décisions. Autrement dit, vous avez besoin de partager de l’information avec l’Allemagne, et sans entrer dans le détail de la manière dont la coopération s’est faite, force est de reconnaître que le résultat a été extrêmement décevant, à tel point que les juges d’instruction parisiens ont adressé un courrier aux parties civiles en 2018 pour déplorer le manque de coopération de la part des autorités allemandes. Cette situation s’explique par le fait que l’agence Eurojust ne possède aucun pouvoir judiciaire propre. Son action s’inscrit dans un système intergouvernemental où les intérêts nationaux continuent de primer. C’est aussi simple que ça.

Avec le Parquet européen, ce genre de situation n’est plus possible. Nous représentons non pas un intérêt national, mais un intérêt européen, un intérêt commun à tous les 22 pays participants. Avec le parquet européen, on n’a plus besoin de faire des demandes d’entraide. Un procureur européen délégué allemand a besoin de collecter de la preuve en France ? Il lui suffit d’assigner des mesures d’enquête à un procureur européen délégué français qui va faire l’enquête pour lui. Et celui-ci n’a d’ailleurs pas le sentiment de travailler pour une autorité judiciaire allemande, il travaille pour le Parquet européen. Lorsque je vous dis que nous traitons actuellement 45 enquêtes ouvertes par les procureurs européens délégués français et quinze enquêtes déléguées par nos collègues dans d’autres États membres, ces quinze enquêtes déléguées sont aussi importantes pour nous qu’un dossier ouvert au niveau français.

Vincent Couronne : Un parquet vert européen mis en place, qu’est ce que ça changerait concrètement pour les Européens ? Parce que ce n’est qu’un parquet, ce n’est pas une cour européenne qui va juger les infractions à la protection de l’environnement.Pourquoi séparer les poursuites qui sont donc européanisées, du règlement du litige qui reste devant le juge national ?  Pourquoi est-ce qu’on n’irait pas devant la Cour de justice de l’Union européenne ?

Ce qui fait la force du Parquet européen, c’est qu’il fait juger ses dossiers par les juridictions nationales.

Frédéric Baab : Surtout pas. Ce qui fait la force du Parquet européen, c’est qu’il fait juger ses dossiers par les juridictions nationales. Vous êtes le plus près possible des citoyens et notre action a toute sa légitimité, parce qu’ in fine ce sont les juridictions des États membres qui rendent les décisions. Ça nous procure un véritable ancrage, j’allais dire une forme d’enracinement au sein de la réalité juridique et judiciaire de chacun des vingt-deux pays participants.

Vincent Couronne : Donc on n’éloigne pas la justice du citoyen.

Le parquet européen n’est pas en suspension dans l’atmosphère, il travaille avec les moyens nationaux pour le compte de tous les citoyens européens.

Frédéric Baab : Non, au contraire. Le parquet européen n’est pas un « machin », auquel les gens ne comprennent rien et qu’ils vont récuser. Voyez tous les discours actuels, que vous connaissez aussi bien que moi, qui consistent à nier la nécessité, et même l’utilité du projet politique européen. Dans notre système à nous, cette critique-là tombe à plat parce que nos dossiers, nous les faisons juger dans le cadre des procédures pénales nationales. Le parquet européen n’est pas en suspension dans l’atmosphère, il travaille avec les moyens nationaux pour le compte de tous les citoyens européens. 

Ce qui plaide également en faveur d’un parquet vert européen, c’est l’indépendance totale de ses procureurs à l’égard des États membres comme à l’égard de la Commission européenne. 

Vincent Couronne :  Venons-en au caractère régalien de la justice, qui est sans doute l’expression la plus ancienne de la souveraineté : il y a 3800 ans à Babylone, le roi Hammurabi était “roi de justice”, tout comme Saint-Louis, au 13e siècle, rendait la justice sous un chêne. Le fait de rendre la justice – le parquet ne rend pas la justice bien évidemment, mais va quand même, par ses enquêtes, participer au processus judiciaire –, pose forcément la question démocratique de l’exercice d’un pouvoir souverain. En France, on a l’habitude que ce soit le garde des Sceaux qui impulse la politique pénale, donc sous le contrôle du Parlement. Si c’est le Parquet européen qui fixe sa propre politique pénale, et si un futur Parquet vert européen fixe sa propre politique pénale, comment et devant qui rend-il des comptes ?

Le Parquet européen rend des comptes chaque année devant l’autorité politique européenne.

Frédéric Baab : Le Parquet européen rend des comptes chaque année devant l’autorité politique européenne. Chaque année, il produit un rapport public que la cheffe du Parquet européen, Laura Codruta Kövesi, va présenter au Conseil des ministres de l’Union et au Parlement européen. Elle le présente également aux parlements nationaux si ceux-ci en font la demande.

Vincent Couronne : Est-ce qu’il y a déjà eu des demandes de parlements nationaux justement ?

Frédéric Baab : Pas à ma connaissance. On vient juste de commencer. C’est notre premier rapport et donc elle est allée le présenter devant le Conseil Justice Affaires intérieures et devant le Parlement européen. Ce rapport est public et il est officiellement transmis à la Commission européenne ainsi qu’à tous les parlements nationaux.

Vincent Couronne : Et est-ce qu’il y a eu déjà à l’occasion de ce premier rapport des demandes de la part du Parlement européen ou du Conseil de réorienter la politique pénale ?

Frédéric Baab : C’est trop tôt, le premier intérêt de ce bilan était simplement de démontrer que ça fonctionne et que le parquet européen est déjà une réussite au niveau opérationnel. Encore une fois, plus de 500 enquêtes ouvertes pour un préjudice total de 5,4 milliards d’euros au budget européen. Mais vous avez absolument raison, la définition d’une politique pénale au niveau européen doit aussi s’inscrire dans un dialogue régulier avec les autorités politiques au niveau européen.

Vincent Couronne : Y a-t-il des chances qu’un accord politique puisse être atteint à moyen terme pour l’extension de compétence aux infractions environnementales ?

Frédéric Baab : La création d’un Parquet européen, c’est un transfert de souveraineté. Ce sont toutes les prérogatives d’action publique d’un parquet national, c’est-à-dire la direction des enquêtes, l’exercice des poursuites qui sont transférées à l’échelon européen. Et c’est pour ça d’ailleurs que toute extension de compétence du Parquet européen sera soumise à un accord unanime des 27 États membres. Il faut que tout le monde soit d’accord pour que le projet aboutisse. L’autre condition de l’article 86 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, c’est que cette extension concerne des infractions graves et transnationales. Sinon ça n’a pas beaucoup de sens de saisir un Parquet européen. 

En matière environnementale, on pourrait obtenir un accord politique, parce qu’on n’est pas au cœur du régalien.

Revenons à la condition la plus difficile à remplir, qui est un véritable verrou institutionnel qui a été posé par le TFUE qui est l’accord unanime du Conseil européen. Dans certains domaines, on voit bien qu’on n’aura jamais un accord unanime. Souvenez-vous que le président de la République, Emmanuel Macron, dans son discours de la Sorbonne en 2017, avait proposé la création d’un parquet antiterroriste européen. Il se trouve que j’ai beaucoup travaillé dans ces dossiers-là quand j’étais membre national français à Eurojust. À partir de la fin de l’année 2015, nous avons été saisis de toutes les grandes affaires de terrorisme en Europe, et parfois même aussi dans des pays tiers. La dimension des dossiers, en particulier celui des attentats du 13 novembre, nécessitait la saisine de l’agence Eurojust parce qu’on se situait ab initio dans un cadre multilatéral. Et donc on avait besoin d’un support opérationnel, comme Eurojust, pour assurer l’entraide judiciaire dans ces dossiers. Vous voyez bien que dans un domaine comme celui-là, on est au cœur de la souveraineté des États. Cela touche directement à la sécurité intérieure et extérieure des pays concernés et c’est bien entendu un domaine dans lequel l’autorité judiciaire et les services de police sont très investis. Dans un domaine aussi sensible que celui-là, il est évident qu’on n’aura jamais un accord politique pour transférer la compétence au Parquet européen. 

C’est la même chose en matière de cybercriminalité par exemple. On touche là aussi à la sécurité des pays attaqués et de leurs forces vives. En revanche, en matière environnementale, là oui, on pourrait obtenir un accord politique, parce qu’on n’est pas au cœur du régalien.

Ce parquet vert européen pourrait également contribuer à jeter les bases d’un ordre public environnemental européen, c’est-à-dire un ensemble de règles et de prescriptions dont le volet pénal serait assuré par un Parquet européen indépendant. Ce dispositif pourrait s’enrichir d’autres dispositifs dans le champ de la prévention notamment. Je pense par exemple à la compliance environnementale, sur le modèle de la compliance anticorruption. Cela concernerait les grandes entreprises dont l’activité principale peut, d’une manière ou d’une autre, porter atteinte à l’environnement. Au-delà donc d’une simple politique pénale dans ce domaine, on pourrait voir se développer un véritable ordre public environnemental européen qui servirait de nouveau standard, non seulement en Europe, mais aussi dans nos relations avec les pays tiers. 

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